STAGES DE YOGA à ST MAXIMIN
Mardi 15 janvier 2013
Notions de nadis (vaisseaux énergétiques) et grandhis (nœuds énergétiques)
Le chakra de l’éther « VISHUDDA » (le centre de purification)
Pranayama : les rythmes et les techniques
Notion de Mental « MANAS »
Samedi 26 janvier 2013
Le YOGA THERAPEUTIQUE
(2ème partie)
Salle Paul Verlaine
de 14h à 16h30
Le
Corps subtil
La
pratique de l'exploration du corps subtil amène progressivement
un déconditionnement des cerveaux. Lors de ces ouvertures, les
notions de temps et d'espace sont remises en question. Les lieux
de la géographie sacrée se présentent alors clairement. Bénarès
la souterraine et Bheragat, domaine secret de la déesse, peuvent
se révéler. L'iconographie indienne est la concrétisation de ces
mondes subtils. Ce n'est pas seulement la représentation de
principes métaphysiques, comme cela est souvent entendu par les
mondes intellectuels.
[…]
L'état
de rêve, quand il n'est plus utilisé comme poubelle de l'état de
veille, devient un révélateur de notre sensibilité au monde
subtil. A ce moment-là, il quitte sa formulation d'histoires,
d'aventures, pour évoluer vers un monde de formes, de couleurs,
de sons dont l'expérience n'engendre plus de conceptualisation.
Les rêves deviennent de moins en moins racontables, de plus en
plus intenses. On peut dire la même chose de l'état de veille :
on ne peut plus penser sa vie ; toutes les constructions de la
peur, de la société mondaine, de l'imaginaire humain se fondent
dans un non-savoir sans attente. Le cerveau apaisé, silencieux,
devient le témoin d'expériences inconceptualisables, où les
notions de passé et de futur, de proximité ou de distance, de
relation ou de séparation, d'intimité ou d'indifférence perdent
leur sens. Ces notions se révèlent alors comme des images
creuses de la réalité, artifices poétiques, conventions qui ont
leur place dans la description superficielle des modalités
sécuritaires et traumatisantes de la vie, mais non comme
actualisation d'expériences unitives.
Inlassablement exprimées dans les manuels de yoga, la plupart
des descriptions géographiques du corps subtil ne font que
répéter la formulation du Shatchakranirûpana telle que traduite
par Arthur Avalon au début du siècle. Comme la Shiva-Samhitâ, ce
texte dépend largement, pour sa formulation, du
Kubjikâmata-tantra de la tradition Kaula, qui date du Xe siècle.
Enseigné comme une réalité à apprendre par cœur pour les examens
de fédérations de yoga, le sens traditionnel de cette imagerie
est le plus souvent incompris. Quand on indique une couleur
correspondant à un centre subtil, ce n'est pas une couleur que
peut imaginer notre mémoire, mais qui se réfère plutôt à un
ressenti : un homme noir n'implique pas une appartenance à la
race africaine, un homme léger n'implique pas une absence de
poids, un homme amer n'implique pas une saveur de la peau.
Ainsi, les couleurs, les odeurs, les formes attribuées aux
différents récepteurs du corps subtil ne sont pas à prendre à la
lettre.
Si,
par exemple, lors d'une séance, le centre de pureté est
particulièrement stimulé, il se peut que la vision de l'espace
prenne, pendant un certain temps, de nombreuses teintes de bleu.
La descente de l'énergie dans ce centre révèle également la
capacité d'une audition multidimensionnelle. Les textes plus
anciens, comme les Goraksha-shataka, Yoga-Yâjñavalkyam, voire
les Upanishads, s'expriment chacun de manière légèrement
différente. Les centres et réseaux du corps subtil s'imposent
dans une conscience non impliquée. Toute tentative de ressentir
les organes subtils, d'intervenir dans le corps éthérique, ne
ferait que stimuler un imaginaire déjà trop fécond. Il n'y a pas
à éveiller l'énergie par des moyens volontaires. Quand la
sensibilité est laissée libre d'appropriations, de refus, les
masses musculaires s'effondrant dans une vacuité profonde, les
différents canaux d'énergie et autres images tactiles se
présentent spontanément. Plus ce corps tactile va s'éveiller
dans la pratique, plus des transpositions impensables vont
s'exprimer dans la vie de tous les jours. La sensibilisation à
ces modalités fera apparaître de nombreux points vitaux présents
dans le corps, auxquels se réfère la pratique de la médecine
ayurvédique et des arts martiaux indiens. Souvent mentionnés,
les centres principaux sont liés à de nombreux autres récepteurs
également importants. Tout cela ne doit pas devenir un sujet
d'étude livresque. Une pratique sans attente, les mains vides,
sans chercher à sentir quoi que se soit, disponible à tous les
sentis possibles sans refus ni peur, est l'espace nécessaire à
ces révélations.
Cette
exploration permettra également de découvrir la présence de
trois nœuds essentiels, granthi. Au bas de la colonne, lié à la
cosmicité du monde : vishnugranthi ; dans le cœur, mort de
toutes nos peines : hridayagranthi ; entre les sourcils où la
connaissance claire, bauddhavijñâna, se reflète : rudragranthi.
Ces trois étapes franchies, par aspiration ou dissolution,
correspondent à l'intériorité de la sâdhanâ.
Les
trois lingam, svayambhû, bâna et turîya, qui habitent ces
portes, se révèlent comme ouverture privilégiée de la
conscience. L'équilibrage naturel de la circulation des énergies
amènera tôt ou tard à ressentir le corps comme un gigantesque
écho de l'univers. La géographie et l'histoire se transposeront
dans chaque région du corps. Toutes les relations profondes qui
s'imposent dans notre vie seront ressenties dans des points
précis de notre corps. La souffrance ou la joie des lieux et des
êtres qui forment notre famille cosmique seront expérimentées
dans des zones très délimitées de la corporalité. La pratique
des âsanas par le corps subtil, ainsi que son déplacement
conscient, libre de l'enveloppe physique, participeront à
l'extinction de notre vie affective et à la révélation de ce
corps géographique généralement étouffé par la tension
musculaire. Toute terre étrangère est ma patrie, quand ma patrie
devient terre étrangère. Tel est l'accomplissement de la
délocalisation corporelle.
Entre
les états de veille, de sommeil et de rêve, se trouvent des
espaces de vie beaucoup plus intenses que ce qu'on appelle
communément la vie. Dans ces résonances, les formes subtiles et
puissantes, si bien exprimées par l'iconographie hindoue,
prennent en charge la vie et transmettent l'enseignement.
Le
corps vacant va parfois être visité par cette immense et
jaillissante verticalité, qui semble n'avoir ni commencement ni
fin. Ce lingam d'énergie ressenti comme une érection à
l'intérieur de la colonne, comme une langue de feu débordante et
simultanément plus ténue qu'un fil de soie, est le sens profond
du yoga traditionnel.
Ce n'est pas à
accomplir, à éveiller ou à créer. Découverte de l'évidence,
reconnaissance de cette énergie toujours neuve consumant passé
et futur dans un brasier constant, cette expérience, symbolisée
par le shiva lingam de la tradition shivaïste, est le cœur de la
vie. Pandit Veeraraghavachar se référait plutôt à la caverne du
cœur où un feu rugissant entourait un lingam d'espace et brûlait
tout encombrement. Jean Klein transmettait la ligne d'écho de la
verticalité organique. Ce mouvement ascendant et secret,
lingam-rahasya, est l'écho direct du secret de la vie. Il est le
reflet dans l'espace-temps du sans-forme, arûpa.
ERIC BARET
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