mercredi 30 mai 2012


Père Henri Le Saux (1910-1973)


Le Père Le Saux est breton d'origine,,..
Il est né à Saint- Briac un petit village d'Ille et Vilaine dans une famille de 8 enfants...
Il fait des études brillantes au Petit puis au Grand Séminaire de Rennes...
on lui propose de continuer à étudier la Théologie à Rome...mais il préfère devenir moine  à l'Abbaye Bénédictine de Kergonan où il entre à 19 ans et est ordonné en 1935...
Il se passionne alors pour la liturgie et le chant grégorien...

Très tôt il s'intéresse à la spiritualité de l'Inde...notamment au travers d'un article de revue qui le met au courant de l'oeuvre de l'abbé Montchanin...  prêtre du diocèse de Lyon qui a fondé en Inde un" ashram "dont le but est de mieux incarner le message chrétien dans les modes de vie, de prières et de contemplations propres à la civilisation indienne...
Il va donc... avec l'autorisation de sa hiérarchie ...apprendre le Tamoul, se perfectionner en anglais, correspondre avec des personnalités religieuses vivant en Inde...et préparer ainsi l'accomplissement de son souhait le plus profond..." collaborer à l'établissement d'une vie monastique chrétienne  bénédictine " dans ce pays...

Il débarque dans ce pays le 15 août 1948...
...  et avec Jules Montchanin il fonde l'ashram du Shantivanam aux environs de Tiruchirapali...
Les deux prêtres commencent à adapter la liturgie...à vivre à l'indienne en portant la robe des moines sannyâsa ( moines errants) et en prenant même des noms indiens...ainsi le Père Le Saux sera -t-il désormais appelé Swami Abhishikteshvarânanda qui sera abrégé plus tard en Abhishiktânanda " Félicité de l'Oint"...

Prise de contact

Henri Le Saux va approfondir progressivement son intériorité...
Il ressent avec de plus en plus de certitude que le plus souvent une partie de l'être n'est pas concernée par la prière officielle de l'Eglise...
or cette partie de l'être non atteinte est la plus divine...donc la plus fondamentale...
la seule finalement essentielle...
Trop souvent nombre de chrétiens réduisent le christianisme à une morale, à une pratique extérieure, à une croyance au seul niveau intellectuel ...qui n'engage pas l'être dans sa totalité...
alors le fond, le Vrai, risque ainsi de ne pas  être découvert...

Pour Henri Le Saux la rencontre avec deux sages: Ramana Maharshi et Gnânânanda   sera décisive...
Ce fut le père Montchanin qui le conduisit auprès de Maharshi six mois après son arrivé en Inde ...
Après le repas pris avec le Sage... puis le soir lors de la récitation des chants védiques il fut séduit par la Psalmodie... et capable alors de saisir l'"auréole intime "qui émanait du sage...tandis que des harmonies inconnues s'éveillaient dans son coeur"...
A toutes les questions le Sage ne faissait que répéter inlassablement: "...il n'y a qu'une chose à faire...regardez au fond de vous ...et si vous le faites comme il faut ...vous trouverez la réponse à vos problèmes..."

Plus tard ce fut sur les conseils du Sage la découverte d'Arunâchala...la montagne de lumière !... à 150km au SW de Madras..
ses grottes...le mystère de cette montagne dénudée dédiée à Shiva  l'inviteront à de multiples retraites...à une redécouverte de la Nature...et de la voie de l'ascèse..
il finira par s'y installer pour de longs séjours...entrecoupés de voyages et de conférences...

" Ô mon Aimé, pourquoi T'esTu caché sous les traits de Shiva et d'Arunâchala...de Ramana le Rishi...pour me donner Ta Grâce...
Est-ce là Ton jeu divin?
Tu prends toutes les formes
et Tu teTe joue de nous
car Tu veux qu'on Te cherche...
au-delà de toutes formes !
Car il n'est pas de forme au monde qui ne soit Tienne
qui ne Te cache à l'ignorant
et qui ne Te révèle à celui qui sait !"

Souvent Henri Le Saux comparera Arunâchala à une aurore: " les oiseaux chantent déjà et mon coeur déjà chante...d'attendre avec joie l'apparition du disque merveilleux"
Ainsi la montagne deviendra son gourou et l'initiera de l'intérieur...
" Arunachala, guru impitoyable
qui me sevras de tout
ce que j'aimais jusque là
de tout
ce que je savourais jusque-là
de tout
sur quoi je m'appuyais jusque-là
les choses de ce monde
comme les choses de l'autre
et me laissais suspendu
libre et nu
dans l'esseulement du Kévala ( nudité de l'acte d'être)
en plein milieu du gouffre
au sein du fond
Ton coeur, ô Arunâchala !"

il écrira dans son journal intime:
" J'étais venu en Inde pour Te faire connaître à mes frères hindous, et c'est Toi Jésus qui T'es fait connaître à moi ici par leur entremise, sous les traits boulversants d'Arunâchala !"

Gnânânanda

Plus tard quand il se rend à l'ashran de Gnânânanda il a déjà reçu la " grâce de l'Inde" ..il est devenu conscient des conditionnements qu'il porte et se manifestent dans l'hérédité, la culture, le langage...et même dans les "noeuds du coeur"
Gnânânanda est un sage du pays Tamoul...la rencontre est fulgurante...cet " homme aux jambes courtes et à la barbe hirsute, vaguement couvert d'un pagne" se révèle à lui comme le prototype du guru...
Rencontre décisive dans la vie d'un homme... rencontre au delà des sphères des sens et du mental...rencontre dans la fine pointe de l'âme...

"Ce que dit le guru jaillit du coeur même du disciple ce n'est pas un autre qui parle...ce n'est pas l'accueil en esprit de pensées qui viendraient d'ailleurs et seraient transmises par le truchement des sens...
Quand les vibrations de la voix du Maître parviennent à l'oreille du disciple, quand son regard perce le sien... c'est du dedans même de soi... de l'espace enfin découvert de son propre coeur qu'éclosent les pensées qui se révèlent à lui même..
Qu'importent alors les mots dont use le guru...toute leur puissance est en leur résonnance intérieure...
en le voyant et en l'entendant c'est l'épiphanie de soi que l'on atteint,...en ce fond de soi où chacun aspire essentiellement même quand il l'ignore...
Le vrai guru est au dedans...
celui qui sans bruit de mots fait entendre à l'âme attentive le : "Tu es cela... TAT-VAM-ASI... des Rishis védiques...

" alors le disciple peut dire au Maître:
Tu nous as fait  passer sur l'autre rive
au-delà du non savoir..."
De cette rencontre boulversante date la détermination du moine bénédictin d'expérimenter par lui même l'advaïta ( la non dualité)...
il décide alors d'aller passer de longues périodes de Silence et de Solitude au désert... en fait dans une grotte d'Arunâchala demeurée libre à la suite de la mort d'un vieux sâddhu...
Son journal rend compte de sa plongée dans le silence, la solitude ,et la pauvreté jusque là pratiquées en dilettante...

Sa sensibilité devant la nature va alors s'exacerber...
Il aime a chanter les psaumes ou les hymnes au crépuscules ou au lever de l'astre divin...
peu à peu son besoin de chanter s'efface  au profit d'un recueillement plus dense qui lui permet de découvrir "l'hymne intime du silence...celui qui soutend tout chant que chantent les hommes, tout chant que chante la création... l'hymne essentiel que nul chant que profèrent les lèvres n'arrivera jamais à formuler..."

Plusieurs visiteurs viennent le rencontrer dans ses moments les plus désespérés..
.et comme il s'en étonne ...on lui répondra que le Soi appelle le Soi...
le hasard n'existe pas...et quand l'âme appelle...une autre est là qui entend...

Tel est ce diciple da Maharshi :Harilal ,qui viendra le pousser à un dépouillement encore plus grand encore...
et visitant sa grotte et les livres qui y sont encore il lui dit:

"- A quoi bon tout celà ?
ces livres,...tout ce temps perdu à apprendre les langues...
en quelle langue s'entretient-on avec l'âtman ?...

Maintenant je ne lis plus ou si peu que c'est tout comme...Pas même la Gîta dont les versets me chantaient constamment dans le coeur...
Pas d'avantage je médite...l'âtman n'a rien à voir avec la méditation...
ni avec la Japa ( la répétition du nom de Dieu)
ni avec les Mantras ( litanies) ...et autres prières...
tout cela on les pratique quand on est encore enfant...on en a besoin alors...
mais tout celà est un jeu...
le jeu de la lilâ ( jeu divin)...

Cessez vos prières...cessez vos rites,...cessez vos contemplations sur ceci ou cela...
réalisez seulement que vous êtes...TAT TVAM ASI...Tu es Cela.!..
Il n'y a nulle part de différence !..
il n'y a que l'âtman...
Dieu est l'âtman...Le Soi de tout ce qui est...
le Soi seul existe...."



Ecartèlement...

Mais Le Saux demeure viscéralement chrétien en ses racines...sa formation est celle d'un occidental...il devra souffrir ce constant écartèlement...
Il en sera de même pour le père Montchanin  parti en Inde pour se faire hindou parmis les hindous...martelant son corps...burinant son esprit sous les meules du sanskrit, du Tamoul, du Védanta...
tout cela pour se découvrir... et s'avouer plus grec que jamais...
fin de ce qui fût pour lui une illusion...
il s'interdira  alors d'écrire et de publier...

Henri Le Saux lui était venu apporter un enseignement...c'est lui qui reçoit une Connaissance Nouvelle...

Dès 1957 il est seul...
le Père Montchanin est parti rejoindre le Père
lui poursuit sa route et se fait citoyen indien en 1960

Il poursuit sa démarche...publications...retraites... voyages...conférences... c'est un ermite mondain... mais seulement de l'extérieur ...
car l'intérieur est profondément souffrance...
son journal en est seul le témoin...mais c'est une vrai nuit de la foi qu'il traverse et l'âme crie douloureusement vers le Dieu absent...

" Qui fera alors comprendre que cette absence est une entrée plus profonde et plus réelle en la Présence...la Présence de Soi à soi...qui est l'Être même de Dieu... qui  Est " l'Être de l'être ?"...
"S'arrêter alors... incapable de nommer, incapable de dire un ni deux...
philosopher alors en shivaïtre shankarien ou en chrétien augustinien c'est faux...
tout celà se passe au niveau réel...au niveau de l'intelligence..."

" ...et si dans l'advaïta c'était moi seul que je trouvais et non Dieu ?...et pourtant ce n'est que depuis la découverte personnelle de l'Advaïta que j'ai retrouvé Paix et Joie de vivre...
J'ai trop goûté désormais de l'advaïta pour pouvoir retrouver la Paix "grégorienne" d'un moine chrétien...j'ai trop goûté de cette paix "grégorienne" pour ne pas être angoissé au sein de mon advaïta"...

il vivra douloureusement le grand écart...
Pourtant il le ressent de plus en plus c'est au delà des schèmes...au delà des structures qu'il faut poursuivre...
" L'Eglise dans son état actuel correspond à un niveau de conscience donné...tout ce qu'elle dit est vrai...merveilleusement vrai...son seul tort est donner une valeur absolue aux termes de gnose et d'histoire en lesquels on cherche à exprimer le Mystère du Christ"
" Le Christ lui même invite à dépasser le plan de tous les archétypes, ceux de la conscience et ceux du cosmos...
Il faut que je m'en aille...il faut que je disparaisse...il le faut à cause de vous à qui ma Présence devient un obstacle..."

Ainsi l'apport des religions est-elle de servir d'introduction... de points de départ de cheminements..
" Heureux peut-être ceux que la caverne satisfait...Mais ceux qu'une angoisse infinie fait se retourner pour voir...ne demeurent-ils point aveugles au soleil qui éblouit ?...
il importe de dépasser la caverne...d'aller plus loin avec une Eglise transfigurée par l'Esprit..." l'enfant a été arraché à la femme et élevé jusqu'au ciel et au trône de dieu..."

Peu à peu il découvre Dieu au fond de lui: " Dieu est au fond de moi et Dieu est le fond de moi; Plus fond que mon propre fond, plus essentiellement à la source de ma pensée que tout ce que je pourrais penser, la source même de ma pensée...et quand je rentre en Dieu tantôt je trouve Dieu...tantôt je trouve moi... moi devant Dieu, Dieu devant moi,... moi passé à Dieu , ou bien Dieu passé à moi....
Qui résoudra l'antinomie suprême des esprits qui demeurent au plan de la pensée ?
Et pour celui qui au delà de la pensée aura éprouvé l'expérience divine quels mots pourrait-il employer qui ne trahisssent l'expérience essentielle ?"

l'idolatrie peut donner bonne conscience...mais c'est  au delà de l'idolâtrie que se situe le rapport avec le Dieu Créateur...l'atteinte du fond exige de tout donner !
" Se résigner à se taire devant Dieu, à ne pas lui parler, à ne pas le prier, à ne pas le louer, à ne pas l'adorer ...
afin de supprimer de sa prière, de sa louange et de son adoration ,la projection
empuantée de soi...
Dieu est pur kevala ( indifférencié) ...le silence seul le loue;...
le silence qui n'est même plus un regard ...mais l'absolu sunyata (vacuité)
Panthéisme crieront les chrétiens aveugles !
advaïta suggèrent respectuesement les voyants...
Toute altérité s'est évanouïe
Pur Mystère
L'erreur serait de tenter d'ériger un sanctuaire au dedans, de vouloir y installer un tabernacle d'y offrir fleur , feu  et encens
tout cela est encore de l'idolâtrie...
L'engouffrement exige de tout donner, de tout offrir... et aussi de tout perdre...
pour tout gagner...
en un mot d'être entièrement démuni, pauvre et nu
La perte doit être sans retour... sans rétention de la moindre corde que ce soit quand on se laisse ainsi glisser dans l'abîme...
tant que l'on est pas rentré dans cette source au dedans de soi d'où naît l'altérité elle même, on a rien compris à Dieu...
, on adore seulement l'idole qu'on s'en est faite"

" Quand l'homme a pu saisir ce dedans, ce fond sans fond, toute conception, pensée, réflexion se retirent...le Moi aussi s'éclipse...
comment aurais-je le droit de dire moi, moi ?
Je ne peut dire Moi sans T'affirmer Toi, la source de mon Moi...Toi seul peut dire Moi !"

" le fond coïncide avec le dedans...à mesure qu'on s'y engouffre le fond recule...on croyait pouvoir l'atteindre...on pensait même avoir la révélation de son abîme...soudain on s'aperçoit qu'il est impossible de l'étreindre...on ne saurait le toucher.

Celui qui pénètre dans ce dedans pense tout d'abord qu'il est comparable à un fruit que l'on pèle, dont on savoure la pulpe, dont on brise le noyau, dont l'on extrait le pépin et dont à l'intérieur de ce pépin l'on découvre le germe irréductible...

Et à mesure qu'on enlève les pelures, des successives pelures apparaissent, toujours plus subtiles, toujours plus adhérentes, c'est l'oignon.
Et le Voyant lui crie: Ne t'arrête pas, ennlève chaque peau, pénètre plus avant, plonge en cet océan qui te semble sans fond,... ce n'est qu'en y sombrant que tu le découvriras, ce fond de l'océan et l'océan lui-même...et toi même l'océan.
Car le dedans une fois atteint, il n'est plus de dedans...
car le fond une fois atteint il n'est plus de gouffre dont quiconque peut dire qu'il en est le fond....
et de grotte en grotte au sein de la montagne...
la grotte la plus intérieure n'est jamais atteinte que la montagne ne soit évanouïe

Le dedans, de qui le dedans serait-il? S'il était le dedans de quelque chose serait-il le Suprême ? L'Être sans nom ?
Ainsi aucune rencontre de dieu n'est possible s'en s'être préalablement rencontré
Qui ne s'est pas rencontré soi-même comment pourrait-il rencontrer Dieu ?
On ne se rencontre pas indépendament de Dieu.
On ne rencontre pas Dieu indépendament de soi

Tant que l'on ne s'est pas rencontré soi même, dans sa nudité du dedans, plus crue encore que sa nudité du dehors, on vit dans le monde de sa fabrication, de son imagination, de son "mind,"
"Soi", le monde et Dieu c'est le monde que l'on rêve et non pas la Réalité"

" retrouver au centre de soi le source de soi
Retrouver en la source de soi le Soi en sa source
Retrouver la source en soi du Soi en sa source...
La grâce c'est le renversement de mâyâ en shakti
de puissance d'extase en puissance d'enstase"
"Il ne s'agit nullement d'aller au devant d'un complément de soi, mais de se découvrir soi, de se rencontrer soi.
Pour le sage hindou la voie vers le salut est au dedans en un sens que ne peut comprendre l'occidental qui toujours rêvera d'un tabernacle intérieur, d'un noyau infissable ou demeure distant de lui le Suprême...
Ce fond de l'âme n'est-il pas lui même le Mystère du Christ, le lieu de la Rencontre Essentielle...
le Christ c'est essentiellement l'éveil de l'homme à son origine a Patre... l'entrée de l'homme au plus profond de soi au delà de son propre fond de son propre soi"

L'homme qui a basculé dans son fond   n'est pas désincarné mais décréé....
De ce fait ses rapports avec la nature et avec les hommes changent totalement.
Il aime dans la liberté, car il aime comme Dieu aime.
Il laisse les autres libres de l'aimer.
Regarde-t-il les pierres, les fleurs, les arbres, les animaux, les astres... il leur est présent en leur apportant le réconfort de sa tendresse....
Pour lui tout est vivant de la vie qui l'anime lui même... son ego étant devenu fluide il participe sans s'assujettir....
D'où la puissance d'admiration et l'enthousiasme communicatif de l'ermite...



La grande Mort

En 1956 Le Père Henri Le Saux réside 15 jours avec son guru Gnânânanda qui lui conseille la méditation sans pensée...
" ni lectures, ni prière, ni mesese, dhyana seule et continuelle...
nul plus alors le chrétien advaitin ne célébrera avec perfection sa messe, ne chantera son office...car à un degré que nul autre ne saurait atteindre il sentira le Mystère divin en chaque geste et chaque mot de la Sainte Liturgie...chaque chose chaque verset de psaume est frémissant pour lui de la divine Présence... de l'éternité de l'Être...car qui chante l'office? qui consacre à  la messe ?...le Mystère impénétrable de Dieu qui EST et se révèle"

La grande Mort... celle du dénuement intérieur des signes et des images dépassée Henri le Saux arrive à la Résurrection et accède au Réel et à la Vérité...
Cette mort qui fait si peur à l'occidental est vécu dans le contexte indien comme une libération...où l'on naît dans l'acte même de mourrir...
cette mort nécessaire permet à l'homme ,même durant sa condition terrestre de transfigurer le temps et l'espace...
physiquement présent il s'intègre en fait ailleurs...

" J'appelle  chrétien un homme  qui aime ses frères pour eux-même et ne se sert pas d'eux pour son propre intérêt...
J'appelle chrétien un homme qui aime Dieu pour Lui même et pour lequel Dieu n'est pas quelque chose dont on se sert... pour obtenir quelque chose pour soi ...dans ce temps ou dans le temps avenir...
Quand enfin Dieu ne sera plus pour moi rien que je puisse voir, entendre, embrasser, comprendre, sentir ... alors enfin j'aurai trouvé Dieu...Dieu en soi...
Lorsqu'enfin Dieu ne sera plus un moyen pour moi mais "rien" pour moi... alors c'est moi qui désormais rien serait emporté au grand souffle de l'Esprit ,au Grand Oeuvre de Dieu..".

Il a enfin trouvé l'équilibre..et c'est dans les années 70 qu'il écrira ses plus beaux textes
Sur les Ecritures tout d'abord ou il souligne que toute lecture des Ecritures Sacrées Upanishads ou Bible exige une préparation...sinon le message demeure scellé... recueillement, intelligence du coeur sont absolument nécessaires...et la foi qui seule peut permettre de déchiffrer le message..
.il rejette donc la logique l'exégèse et son enfermement..;
  Une expérience ne se transmet pas...elle se propage ...et les Ecritures n'ont que valeur de signe...il faut éprouver soi même le message...

" Lis, étudie sans cesse, médite les écritures
cependant une fois que la lumière a brillé
au dedans de toi
laisse les tomber comme on laisse tomber
le brandon qui a saisi à allumer le feu
(Amritanâda upanishad)
"Le signe doit s'effacer devant la Réalité...Tout s'éclipse en la Présence et dans la Présence"...
De même il ne faut pas se complaire dans la méditation pour elle même...même si celle-ci constitue une aide précieuse...elle peut conduire le cheminant vers de Pseudo-expérience et non pas la Vraie Expérience...
Seul compte véritablement le Silence...
" et qui a atteint le silence comment pourrait-il le savoir...le savoir c'est le dire...et tout dit rompts le silence..."

"Or c'est dans ce Silence que surgit l'Illumination... cette Illumination ...cet Eveil est l'état naturel de l'homme...
et ce qui empêche l'éntincelle de jaillir c'est l'encombrement de l'esprit par toutes sortes de désirs et de conceptions...
Ainsi la lumière ne jaillit pas à l'issue d'un acquisition...mais par un dépouillement de tout ce qui peut y faire obstacle..."

"Moine vient de monachos qui en grec veut dire Un ( monos)...on pense tout se suite à l'état de solitude ...mais c'est plutôt l'unité de l'orant avec le créateur qu'il s'agit...
et de même que l'orant ignore qu'il prie... l'homme unifié ne saurait percevoir sa véritable identité...l'état du moine coïncide avec l'état de non dualité qui est l'advaïta...les rites peuvent alors disparaitre..."

" Quand il y a dualité l'un voit l'autre, l'un sent l'autre, l'un goûte l'autre, l'un parle à l'autre, l'un pense l'autre, l'un connaît l'autre...mais si le seul Soi est tout l'homme ...Qui verrait-il et comment?...
Qui écouterait-il et comment?...
Qui penserait-il et comment?...
Qui connaîtrait-il et comment? ...
Comment connaîtrait-il Celui par qui il connait tout?...
Par qui connaître le Connaisseur?...
unifié l'Eveillé dépasse toute contradiction et toute antinomie...
il se tient au delà de la mort et de la vie du non-être et de l'être de la connaissance et de la non-connaissance...
l'Eveillé n' a pas à se situer...il ne cherche pas à savoir qui il est...
Le voudrait-il qu'il ne le pourrait pas...
Ainsi le sannyâsa est engagement dans une voie apophatique...au sein d'une telle expérience l'homme ne peut plus se définir que de manière négative, par négation de négations qui s'effacent les unes les aurtres...en réalité rien ne saurait être dit.. et.soudain un éclair illumine l'espace du coeur...
...l'oeil cligne  et on crie Ah !"

L'avantage de l'ermite vivant dans la solitude et le silence c'est qu'il se sent appelé intérieurement...le Soi appelle, la Présence souhaite être reconnue:
" L'homme porte ainsi en lui le drame de l'absolu...l'homme c'est l'être kénosé, l'être qui se sait l'Être par un instinct très sûr, par un instinct qui ne peut tromper...
Mais il ne peut se retrouver soi-même en l'Être...
Il est comme un nageur balloté par les vagues qui ne sait où retrouver pied...
Il remue bras et jambes mais nul de ses membres, nul de ses facultés ne peut s'agriper au Réel...
Celles-ci ne rencontrent jamais que des ersatzt du Réel, des formulations valables seulement en ce monde créé, en ce monde relatif...en ce monde qui passe ...mais incapables de faire passer l'homme à l'Absolu qu'il Est...
et c'est ce stigmate fondamental de la nature humaine que la théologie chrétienne a admirablement mis en lumière en montrant que dans sa propre nature est inscrit son appel à Dieu, en Soi...
Le péché originel quoi qu'il en soit de sa nature historique est l'expression la plus forte du "stigmate" congénital à l'homme qui se découvre jeté là dans le monde...homme non achevé sans la Grâce...la Grâce étant le Christ"

Il est difficile à l'homme de saisir la densité de sa profondeur...
" Tu es plus profond et plus réel que tout ce que tu peux percevoir, imaginer ou concevoir...Tant que tu te perçois ou tu te conçois... tu ne t'es pas encore atteint, tu vis en la superficie de toi...
La délivrance c'est d'atteindre le centre de toi...
le centre de toi c'est le Mystère de Dieu...le Mystère...
Dieu au fond de ton coeur...
le Ciel est le fond même de ton coeur...Ciel étant la manière de te faire comprendre que tu es toi même au delà de toi même ineffablement..."

" Cherche Dieu jusqu'à ce que tu Le trouves
au delà de toute pensée de Lui et de tout sentiment de Lui
au delà de la pensée que tu as de Son impensabilité
au delà du sentiment que tu as de Son " inexpérimentabilité"
Et pour chercher Dieu cherche toi toi même
au delà du sujet dont tu as conscience qu'il perçoit, qu'il sent, qu'il pense
au delà du sujet qui a conscience qu'il se perçoit, qu'il se sent, qu'il se pense soi-même
Tant que tu auras encore conscience de toi tu ne te seras pas atteint toi-même
Tu es aussi loin de toi que Dieu est loin de toi
Dieu est aussi proche de toi que tu nes proche de toi même
Dieu est aussi loin de toi au dedans de toi
qu'il est loin au dehors de toi
Parcours le champ des étoiles, dépasse les galaxies
et tu n'auras pas encore atteint Dieu
Le Ciel de Dieu est au delà de tous les cieux que peut atteindre l'homme par les sens ou sa raison
Le Mystère que tu portes en toi est lui aussi au delà de toutes les galaxies que peut parcourir ton esprit
Dieu est aussi transcendant à toi quand tu le regardes au dedans que lorsque tu le regardes dehors
et tout autant inaccessible"
Le danger constant est de l'appréhender à un faux niveau...de le considérer comme on regarde une créature et de s'abandonner ainsi   à l'idolâtrie...
D'ou la nécessaire purification continuelle de cette idée...et de toute dualité de celui qui cherche...couper la différence entre celui qui cherche et Celui qui est cherché......d'où la necessité du silence...de l'imagination...des sens...de la pensée...et même de l'idée de la Présence...et la nécessité de s'engouffrer en Elle comme le papillon dans la flamme...

Le disciple...

En octobre 1971 Henri Le Saux rencontre à Dehli Marc Chaduc...étudiant au grand séminaire de Lyon et qui à 27 ans va devenir son fils spirituel...
Ils vont vivre ensemble des expériences spirituelles de très haute intensité... Marc deviendra lui aussi moine ...un nouveau sannyâsi chrétien par immersion dans le Gange en Juin 73...
De disciple qu'il était Henri Le Saux devient   gourou vivant à son tour le sentiment de plénitude de toute paternité spirituelle...
Les rencontres mystiques seront alors d'une intensité telle qu'il deviendra difficile à l'un et à l'autre d'en soutenir l'ampleur...
Le Père Le Saux en raison de son extrème sensibilité et de sa résonnance  en sera particulièrement ébranlé...  
et le 14 juillet 73 c'est la crise cardiaque dans une rue de Rishikesh... 
il est recueilli et soigné par les soeurs franciscaines à Indore...

Cet épisode douloureux est pour lui l'occasion d'une grandre félicité...de Béatitude absolue,...d'Eveil soudain... de pure Conscience et de totale Libération...
" Ma crise cardiaque ne fût que la toile de fond d'un temps spirituel merveilleux...Je n'ai que le souvenir d'une Joie intense... et de 2 semaines passées au lit...
vie et mort ne sont pour moi désormais que des situations existentielles..."
Je sais maintenant que l'Upanishad est vraie...c'est l'entrée dans la Lumière Suprême...l'Atman...c'est la Félicité..c'est Brahman...
J'ai découvert le Graal ...et le Graal n'est ni loin ni près...
il est hors de tout lieux...l'envol, l'Eveil...la quête est consommée..."
"Je connais ce grand Purusha
couleur de soleil
d'au delà des ténèbres
Celui qui l'a reconnu
passe outre la mort
Il n'y a pas d'autre chemin à suivre"
La mort physique est secondaire ......seule la mort" métamorphose " celle que l'on rencontre quand l'homme plonge en son fond est importante... c'est la grande mort du Moi !
La petite mort il la vivra le 7 décembre 73 toujours chez les soeurs franciscaines d'Indore après une deuxième crise cardiaque...
"Dieu est trop Lumière pour se maintenir en face de Lui...On disparait absorbé dans la Source"
Il fut inhumé à Indore .
... 21 ans plus tard le 10 décembre 1994 ses restes furent tranférés au Shantinavam et enfouis aux côtés de deux autres tombes...celle de Père Griffiths moine anglais et successeur de l'abbé Montchanin..et bien sûr celle de l'abbé Montchanin lui même qui demeurera vide...ses restes étant toujours à Bièvres près de Paris...
Quand à Marc Chaduc...c'est à lui que nous devons la transcription du Journal du Père Le Saux...
Après avoir jeté l'original dans le Gange...et avoir poursuivit quelque temps son errance en Inde...vers la Lumière...ses dernières nouvelles le situaient en Himalaya...et depuis ...rien...
nul doute qu'il a trouvé aussi la paix de l'âme en ce monde ou ailleurs...rayonnant lui aussi dans l'Eveil de l'Aurore sans fin...

lundi 28 mai 2012


Etre touché  


L’homme communique avec le monde par l’intermédiaire de ses cinq sens. A partir des informations recueillies par nos sens se structure notre conscience.

Par Pierre-Michel Trémeau
Du fonctionnement harmonieux et de la profondeur d’action de nos sens dépendra donc l’élargissement et la subtilité de notre conscience.
Le sens du toucher joue probablement un rôle particulier. Il est celui qui crée la relation la plus intime avec le monde extérieur. Capable d’une richesse quasi illimitée d’informations, il agira sur une gamme de sensations pouvant aller du plaisir à la souffrance, de la répulsion à la sensualité.
Chaque sens s’exprime à la fois de l’extérieur vers l’intérieur : je touche quelque chose, j’enregistre une certaine information ; mais aussi de l’intérieur vers l’extérieur : à travers la qualité de l’action de mes sens se transmet aussi une certaine information destinée à mon entourage.
Douleur et soulagement

Le toucher ne nécessite pas la mise en oeuvre d’un organe particulier et limité, comme l’oeil par exemple. Tout le corps peut toucher et devenir source et émetteur d’informations. L’acte de toucher est le premier réflexe lié à toute sensation douloureuse du corps. A lui s’associe spontanément l’idée de guérison et de soulagement.
Le sens du toucher se manifeste comme prolongement de l’action de tous les autres sens. Je regarde une fleur. Restant avec elle quelques instants, subtilement, toujours à travers le regard, mais aussi au-delà, quelque chose en moi touche la fleur et en retour sera aussi touché par cette fleur.
Nous employons communément le verbe toucher au sens figuré. Contemplant une oeuvre d’art ou assistant à un spectacle, nous disons : « Cela me touche » ou bien : « Je me sens touché par telle chose ou telle personne. » Parfois sans qu’il y ait eu aucun contact concret. Cette très fine expansion de nos sens met l’accent sur la dimension subtile de l’acte de toucher dans l’élargissement de notre conscience.
Dans l’intimité de l’autre

Quelle que soit l’action envisagée, même la plus simple, comme le geste banal de toucher quelqu’un avec la main, tous ces différents paramètres seront présents plus ou moins consciemment. Ma main se pose sur la main de l’autre. Celui-ci en ressentira aussitôt le message : agression, amour, sympathie, soulagement. Parce simple geste, nous-mêmes pouvons entrer dans l’intimité de l’autre, comprendre son état d’être, sa souffrance, son bien-être, ses tensions...
A travers ces exemples émerge une question centrale : Qu’est-ce qui touche l’autre en moi ? Au sens strict bien sûr, il s’agit de ma main. Mais celle-ci n’est que le prolongement de mon bras, de mon corps, lui-même reflet exact, avec ses tensions, ses blessures, ses blocages, de mon âme, de mon être le plus intime. A cela encore s’ajoutent la qualité de l’acte, la délicatesse du mouvement, du contact...
Il apparaît que l’acte de toucher exprime la réalité profonde de celui qui touche. Cela est d’autant plus important dans le cadre des relations familiales comme mari et femme ou parents et enfants, mais aussi dans la relation thérapeute patient.
Questions

De la qualité d’être dans laquelle celui qui touche s’enracine dépendra le ressenti de celui qui est touché, et bien sûr sa réponse, même inconsciente. Certains contacts permettent à l’autre de se laisser aller, de s’ouvrir, de s’épanouir... D’autres suscitent une réaction de défense, parfois même de rejet.
Nous le voyons, l’acte de toucher s’inscrit selon deux grands axes extrêmement proches :
- permettre une perception la plus fine possible ;
- susciter une réponse la plus positive possible dans le sens de l’ouverture et du bien-être.
Intégrant cela, nous comprendrons facilement l’utilité pour un soignant par exemple - de prendre d’abord soin de lui-même avant de s’engager dans une action vers l’autre. Avant de toucher l’autre, posons-nous les questions :
- Avec quoi vais-je toucher cette personne ?
- Avec quelles tensions, avec quel amour et que vais-je lui transmettre ?
- Comment vivra-t-elle cela ?
Mal être profond

Etre touché est une expérience toujours délicate et profonde qui peut se révéler positive mais aussi, inversement, très déstabilisante.
Nous sentons qu’à travers ce contact l’autre nous met en situation de faiblesse, de vulnérabilité. Sans doute en attendons-nous bien-être et soulagement, mais en cas de doute, nous serons réticents. Cela dépendra en général non pas de la technique du thérapeute mais beaucoup plus de ce que nous percevons de lui en tant qu’être et de la confiance que nous plaçons en lui.
Certaines personnes, très sensitives, ou parfois ayant été profondément blessées antérieurement, refusent ou acceptent très difficilement d’être touchées. Cela sera alors toujours le signe d’un mal-être profond et d’une souffrance intérieure intense.
Le toucher suspect

Notre civilisation moderne suscite de nombreuses névroses, refoulements, inhibitions, créant aussi l’apparition de diverses déviances du comportement, les perversions, par exemple. Aussi, dans ce qu’il a de naturellement sensuel par rapport à l’ouverture et à l’intimité qu’il suscite, le sens du toucher apparaît souvent comme éminemment suspect.
Les enfants aiment toucher, c’est ainsi qu’ils appréhendent d’abord le monde. Ensuite, à l’adolescent puis à l’adulte, on conseillera plutôt de ne pas trop se toucher ni de trop toucher l’autre.
Les notions de communication, de plaisir et de sensualité sont essentielles dans l’acte de toucher. Nous le savons par diverses études, la communication par le toucher dans le cadre familial, par exemple, est une importante source de régulation du stress et d’épanouissement.
Le plaisir

Le plaisir lié au toucher est bien entendu naturel, mais il apparaît souvent suspect en raison des a référence sexuelle vis-à-vis de laquelle nos contemporains sont si souvent inhibés, malgré les apparences trompeuses d’une certaine libération affichée, à travers la pornographie par exemple. Enfin la sensualité est l’expression de l’extrême délicatesse de celui qui touche comme un acte subtil engageant la totalité de son corps et de son esprit.
Nous avons souligné ici quelques-uns des aspects constituant la richesse du sens du toucher. Il faudrait encore parler de l’extraordinaire développement possible de ses sensations. La main, outil de perception aiguisé et intelligent, pourra donner au thérapeute entraîné de très nombreuses informations sur l’état de la zone en contact mais aussi, au-delà, sur la santé globale du patient examiné. Il ressort de tout cela l’importance de la qualité d’être de la personne à partir de laquelle elle touche l’autre. Cela dirige naturellement notre attention vers la nécessité d’un travail de développement personnel.
Développement positif et guérison

Les axes de ce travail envisageables sous différentes formes peuvent être multiples, mais ils demeureront à peu près toujours les mêmes, quelle que soit la technique, à savoir : relaxation, ouverture à soi et à l’autre, concentration, sensibilité, délicatesse, gestion harmonieuse de ses propres blocages et souffrances, compassion, etc.
D’une façon générale, nous pouvons dire que du développement le plus harmonieux possible des qualités humaines et spirituelles de la personne, jaillira l’aptitude la plus efficace à entrer en contact avec l’autre par le toucher, créant alors les meilleures relations favorables au développement positif de soi, de l’autre et à la guérison.
1994
Pierre-Michel Trémeau



samedi 26 mai 2012


 Jean Klein est sans doute l'un des sages qui parlent le mieux de la Non-Dualité. Tout est condensé là : dans ces quelques lignes extraites de la Conscience et le Monde.
Jean Klein :
"La Conscience et le Monde"
(ed. l'Originel)

Voilà résumé l'essentiel de l'enseignement en quelques pages :
Celui qui brûle de connaître sa vraie nature doit d'abord comprendre qu'il s'identifie par erreur aux objets : «je suis ceci», «je suis cela». Toute identification, tout état, est transitoire, par conséquent sans réalité. Identifier le «je » à ceci ou cela est la racine de l'ignorance. Demandez-vous ce qui est permanent au cours de toutes les phases de la vie. Vous découvrirez que la question : «qui suis-je?» n'a pas de réponse. Vous ne pouvez pas expérimenter ce qui est permanent dans une relation sujet/objet comme quelque chose de perceptible. Vous pouvez seulement formuler et expliquer ce que vous n'êtes pas. La continuité que fondamentalement vous êtes ne peut se traduire en mots ou se rationaliser. Être est non-duel, absolue présence sans éclipse, quelles que soient les circonstances.
Si nous considérons le connaisseur indépendamment du connu, il se révèle comme pur témoin. Quand connaissance et connaisseur ne font qu'un, il n'y a plus de place pour un témoin. 
Toute imagination est irréelle, car basée sur la mémoire. Mais tout ce qui n'est pas anticipé, tout ce qui est inopiné, qui provoque la surprise, l'étonnement, provient de la réalité vivante. La recherche du plaisir naît de la souffrance, de la mémoire. Accueillez la vie comme elle se présente, ne mettez pas l'accent sur le monde mais changez votre attitude à son égard. Votre conception du monde, de la société, a sa source dans la croyance que vous êtes un ego séparé. Soyez votre totalité et le monde changera. Le monde n'est pas autre chose que vous. Le monde est en vous, la société commence avec VOUS.

Vous dites que nous ne devrions pas commencer par tenter de changer le monde mais notre attitude à son égard. Quand vous dites que l'existence est le film mais que nous ne sommes pas le film, entendez-vous par là que nous sommes la lumière qui éclaire le film?
Oui. Vous ne pouvez changer le film parce que tous les efforts pour le modifier relèvent du film.

Vous identifier à votre corps et à votre personnalité vous bride, vous rend dépendant. Nos perceptions sensorielles reposent sur les constructions de la mémoire et impliquent un connaisseur. Nous devons étroitement examiner la nature du connaisseur. Cela requiert toute notre attention, tout notre amour. Ainsi vous découvrirez ce que réellement vous êtes. C'est l'unique sadhana. Se résorber dans la conscience de sa vraie nature est liberté. Notre vraie nature prend tout en charge.
Les images naissent et meurent dans le miroir de la conscience, et la mémoire crée l'illusion d'une continuité. La mémoire n'est qu'un mode de pensée, elle est purement transitoire. C'est sur ce fondement instable que nous construisons tout un monde de situations. Cette illusion fait obstacle à la claire vision.
Lutter pour nous améliorer ou pour progresser ne fait que rajouter à la confusion. Les apparences extérieures peuvent nous induire à croire que nous avons atteint un état de stabilité, que des changements ont survenu, que nous progressons et que nous sommes au seuil de la grâce. En fait, rien n'a changé. Nous n'avons fait que changer les meubles de place. Toute cette activité se déroule dans l'esprit, c'est le roman de notre imagination.  
Tout est beaucoup plus simple que cela. Pourquoi faire si compliqué? Ce que vous êtes fondamentalement est toujours là, dans sa globalité. Cela ne nécessite ni purification, ni changement. Pour votre vraie nature, il n'y a pas de ténèbres. Vous ne pouvez découvrir ou devenir la vérité car vous l'êtes. Il n'y a rien à faire pour vous en rapprocher, rien à apprendre. Rendez vous seulement compte que vous essayez constamment de vous éloigner de ce que vous êtes. Cessez de gaspiller votre temps et votre énergie dans des projections. Vivez cet arrêt sans paresse ni passivité, habitez pleinement la fraîcheur que vous trouverez en cessant d'espérer et d'anticiper. C'est aussi votre sadhana.
Il n'y a rien à perfectionner dans la réalité. Elle est perfection. Comment pourriez-vous vous en rapprocher davantage? Il n'y aucun moyen matériel pour l'atteindre.
N'est-ce pas fataliste de dire que nous ne pouvons changer le film?
Dire : fataliste implique que vous vous identifiez au film, que vous vous soumettez à lui. En fait, le film se déroule et vous êtes le spectateur. Être hors de l'écran vous donnera une nouvelle perspective sur ce qu'est réellement le film. A partir de cette vue globale qui n'est plus un point de vue, qui est hors du temps et de l'espace, tout se produit dans une absolue simultanéité. Aussi n'y a-t-il rien à changer.
Pour revenir à ce dont nous parlions auparavant, vous avez dit que le monde change quand la perception que j'ai de lui change. Comment est-ce possible?
Celui qui a atteint sa pleine maturité, qui se connaît sciemment, ne se pliera pas nécessairement aux conventions sociales. Un tel être agira au bon moment, suivant ce que la situation indique, sans que personne ne soit lésé d'une quelconque façon. Si vos actes sont régis par vos désirs, vous n'avez aucune espèce de liberté. Par contre, si vous faites ce que réclame la situation, vous faites ce qui est juste, et vous et votre entourage êtes libres.
Un sage n'a pas la moindre pensée d'être une personne quand il agit, sent ou pense. L'ego est totalement absent. L'ego n'est rien de plus qu'une pensée et deux pensées ne peuvent cohabiter simultanément. Aussi l'identification à l'ego ne peut avoir lieu qu'une fois disparue la pensée rattachée à l'objet. C'est alors seulement que l'ego déclare sienne cette pensée. Ce sens de la propriété : «j'ai vu ceci », «j'ai fait cela », intervient après le fait et n'a rien à voir avec le fait. Une fois que ce mécanisme est clairement perçu, vous comprenez que l'identification que vous aviez précédemment prise pour une réalité n'est qu'une illusion. Vous n'êtes pas le propriétaire de la situation pas plus que vous n'en êtes l'esclave. Votre vraie nature est au delà. Le silence de la conscience n'est pas un état, c'est le continuum où tout état, toute chose apparaît et disparaît. Les mots que nous utilisons dans l'état de veille pour parler de ce non-état sont une expression de cette conscience. Quand nous vivons dans la conscience, tout est expression de cette conscience.  
Le monde que vous percevez n'est rien d'autre que leur roman de votre imagination, basé sur la mémoire, la peur, l'angoisse et le désir. Vous vous êtes retranché dans ce monde. Voyez cela sans vous jeter sur des conclusions et vous serez libre. Vous n'avez nul besoin de vous affranchir d'un monde qui n'existe que dans votre imagination.
Ce que vous prenez pour une réalité est simplement un concept surgi de votre mémoire. La mémoire surgit de l'esprit, l'esprit du témoin, le témoin de votre vraie nature. Vous êtes le témoin, le spectateur placé sur la rive et regardant le fleuve couler. Vous ne bougez pas, vous êtes au delà du changement, au delà du temps et de l'espace. Vous ne pouvez percevoir ce qui est permanent parce que vous l'êtes.
N'alimentez pas les concepts dont vous avez fait vos fortifications ou l'image que les gens ont de vous. Ne soyez ni personne ni rien, contentez-vous de rester à l'écart de ce que la société vous demande. Ne jouez pas son jeu. Cela vous établira dans votre autonomie.
L'exemple, si souvent utilisé dans le Vedanta, du serpent et de la corde, d'un côté se réfère au monde et, de l'autre, à la réalité ultime. Le serpent représente le monde des objets où nous rencontrons les personnalités, les pensées, et l'affectivité. La corde symbolise la réalité ultime, le silence de la conscience. Une fois que nous cessons de prendre la. corde pour le serpent, l'idée du serpent disparaît et nous voyons la corde pour ce qu'elle est réellement. Il est parfaitement naturel que l'erreur perde sa substance et se dissipe quand la vérité devient évidente. Étant donné qu'une pensée fait partie intégrante de l'illusion, il lui est impossible de nous révéler la réalité ultime. Le « fait-d'être », la toute présence, qui est la source de toute expérience, est au delà de la dualité expérimentateur/expérimenté. Quand l'accent se trouve sur la conscience et non sur la pensée ou sur la perception, nous entrons progressivement dans une détente profonde, à la fois sur le plan neuro-musculaire et sur le plan mental.
Si nous observons avec détachement l'apparition et la disparition de tous les états que nous expérimentons, nous parvenons bientôt à appréhender que chaque état, chaque perception, chaque pensée sont réabsorbés dans une connaissance informulée, une connaissance qui est l'être. Ce continuum, seule réalité, est là avant que ne commence l'activité. Immergez-vous dans cette tranquillité chaque fois qu'elle se fait sentir.
Vous ne pouvez vous attendre à ce que la réalité surgisse, car elle est toujours là. Les événements apparaissent et disparaissent. N'oubliez jamais le caractère fugitif de toute expérience, c'est tout ce que vous avez à faire et la porte de la grâce s'ouvrira devant vous. Dès que des opinions et des réactions telle que «j'aime, je n'aime pas», interfèrent, vous retombez dans une habitude subjective et vous tissez autour de vous un filet, vous perdez de vue votre vraie nature. Les sentiments de sympathie et d'antipathie vous font tourner le dos à votre vraie nature. Vos concepts de changement, de progrès, en mieux ou en pire, sont fragmentaires et subjectifs. Quand vous regarderez le monde depuis votre totalité, le monde changera en vous. Vous êtes le monde.
Est-ce que l'absence de pensée que j'expérimente dans la méditation est proche de ma vraie nature? Est-ce la tranquillité dont vous parlez ?
Dans ce que l'on nomme ordinairement la méditation, vous cherchez sciemment à vous débarrasser de toute intention et de tout concept. Ainsi vous vous trouvez devant un écran vide de pensées, qu'elles soient objectives ou subjectives. Ces pensées éliminées, d'autres, plus coriaces, apparaissent, vous envahissent sans discrimination, et elles aussi, vous les chassez. Il est vrai qu'au bout d'un certain temps de pratique, l'activité mentale diminue. Cependant, si le chercheur n'est pas guidé par un maître authentique, le vide de l'écran restera toujours un mystère. Le silence de la conscience dont nous parlons est au delà de la présence ou de l'absence des pensées et des mots, au delà de l'action ou de la non-action. Tout surgit de la tranquillité qui est au delà de l'esprit, de la tranquillité qui est au delà de l'effort de s'affranchir des pensées, et tout s'y résorbe. Rien, absolument rien, ne peut affecter cette tranquillité. Le savoir objectif nous parvient par l'instrument organique adéquat, mais le silence de la conscience ne requiert aucun instrument.
Est-ce que les conflits et les guerres sont inhérents à l'être humain ?  
Les conflits appartiennent à l'ego, pas à l'être humain. Dans votre vraie nature qui est unité aucun conflit n'est possible. Tension, rivalité, agressivité ne concernent que l'ego. Demandez-vous seulement à quel point vous êtes soumis à vos habitudes, à vos opinions qui sont la source de perpétuels conflits. Observez comment fonctionne votre esprit, observez-le sans idées préconçues. Un moment viendra où vous vous trouverez dans l'observation et non dans l'esprit. Puis, quand toute tension aura disparu, vous vous rendrez compte que vous êtes la lumière qui brille au-delà même de l'observateur. La réalité n'est ni un produit de l'esprit, ni le résultat d'une caravane de pensées, elle est, c'est tout. Vous devez comprendre que vous ne pouvez jamais trouver votre vraie nature dans une perception. La seule méthode que nous pouvons suggérer est d'observer sans analyse la façon dont votre esprit réagit dans les diverses circonstances de la vie quotidienne. Ne modifiez pas votre vie pour coïncider avec un concept. Vivez comme vous le faisiez, pensant et sentant, soyez simplement conscient que ce sont des fonctions. Ainsi vous vous en libérerez spontanément. Ensuite la personnalité que vous pensez être disparaîtra. Il ne restera que le témoin. Au terme, même lui se résorbera dans la connaissance ultime.
Ce qui surgit d'inattendu, d'impromptu, sans cause, libre de tout passé, ce qui surgit sans racines, ce qui ni ne s'épanouit ni ne se flétrit, ce qui est le plus naturel, libre de toute tension, c'est cela votre vraie nature.

jeudi 24 mai 2012

l'Enseignant



Le bon enseignant enseigne peu,le meilleur n'enseigne pas.

Il est l'expression de la Réalité
et laisse diffuser le parfum de l'Absolu,

A entendre sans intention d'écouter. 

Alors il y a célébration...



MONKO    

mercredi 23 mai 2012

SUR LES EPREUVES . 


Lorsque le serviteur est soumis à une épreuve, il commence par agir de son propre chef puis, lorsqu'il se trouve impuissant à faire face à cette épreuve, il sollicite l'assistance des créatures, comme les sultans, les hommes aux postes importants, les hommes puissants et les spécialistes en médecine, en cas de maladie, et d'autres disciplines.

S'il n'arrive pas, malgré cela, à trouver la voie du salut, il revient vers son Seigneur à travers les invocations, les implorations et les louanges. Tant qu'il trouvera des capacités en lui-même pour affronter cette épreuve, il ne se tournera pas vers les créatures, et tant qu'il trouvera une assistance chez les créatures, il se tournera pas vers le Créateur.

Ensuite, s'il ne trouve pas une assistance auprès du Créateur, il demeure entre Ses mains, en continuant à l'Invoquer, à L'implorer, à Le louer, en oscillant entre peur et espérance. Il continuera ainsi jusqu'à ce que Dieu le rende incapable d'invoquer et Dieu ne lui répond pas jusqu'à ce qu'il abandonne tous les moyens.

Dés lors, le décret divin s'appliquera à lui et agira en conséquence. Le serviteur abandonnera alors tous les moyens et tous les mouvements, et il ne sera plus qu'un esprit subtil. Ce faisant, il ne verra que l'acte de la Vérité, et il sera convaincu par nécessité qu'il n'y a de bien et de mal, de tort et d'avantage, de don et de privation, d'ouverture et de fermeture, de vie et de mort, de puissance et d'avilissement, que par la volonté de Dieu.

Il deviendra, entre les mains du destin, comme l'enfant aux mains de sa nourrice, comme le mort entre les mains de celui qui le lave.
Il sera retourné, transformé et changé, sans pouvoir faire un mouvement en soi ou vers autrui ; il sera absent par rapport à lui-même, soumis à l'acte de son Seigneur. Il ne verra que son Seigneur et Son acte ; il n'entendra pas et ne comprendra pas ce qui vient d'autrui. S'il voit, entend et comprend, ses paroles auront une ouïe, et sa science une science propre.

Des bienfaits de son Seigneur, il profitera ; de Sa proximité, il se réjouira ; avec Son rapprochement, il sera honoré et ennobli .
Sa promesse sera pour lui une sérénité et une joie, Sa confidence, une intimité ; tout ce qui n'est pas Lui sera mélancolie et tristesse pour lui ; Son évocation sera un refuge et un abri pour lui ; il mettra sa confiance en Lui et sera guidé avec la lumière de Sa connaissance ; il sera initié à Ses sciences mystérieuses et aura une connaissance des secrets de Son pouvoir. Il entendra et comprendra par Lui. Pour tout cela, il louera, fera éloge, remerciera et invoquera.

La purification des cœurs, Enseignements spirituels du Cheikh Abdelkader al-Jilânî p16-17

lundi 21 mai 2012

Le Bonheur par Ramana Marashi

Le bonheur est notre être essentiel

Le bonheur réside au plus profond de nous, dans le cœur même de notre être.
Le bonheur n'existe pas dans un objet extérieur, mais seulement en nous, qui sont la conscience qui connaît le bonheur. Bien que nous semblent dériver le bonheur des objets extérieurs ou des expériences, le bonheur que nous avons donc profiter de pose en effet de l'intérieur de nous.

Quelle que soit la tourmente notre esprit peut être, dans le centre de notre être, il existe toujours un état de paix et de joie parfaite, comme le calme dans l'œil d'une tempête.
Le désir et la peur agiter notre esprit, et obscurcir sa vision de la joie qui existe toujours en lui. Quand un désir est satisfait, ou la cause d'une crainte est enlevé, l'agitation de la surface de notre esprit s'apaise, et que le calme temporaire de notre esprit jouit d'un avant-goût de son bonheur innée.

Le bonheur est donc un état d'être - un état dans lequel l'agitation habituelle de notre esprit est apaisé.
L'activité de notre esprit, il perturbe le calme de son état d'être juste, et lui fait perdre de vue son bonheur intime propre. Pour jouir du bonheur, donc, tout notre esprit avez à faire est de cesser toute activité, revenir tranquillement à son état naturel de l'être inactif, comme il le fait tous les jours dans un profond sommeil.

Le vrai bonheur est donc le bonheur d'être simplement, qui est le bonheur parfait et absolu que dans la littérature mystique est connu sous le nom «béatitude».
Ce vrai bonheur d'être est aussi décrit comme «la paix de Dieu, qui surpasse toute intelligence", car il est connu dans son intégralité que dans l'état parfaitement paisible d'être juste, qui est l'état dans lequel toute activité mentale a diminué dans le la clarté de la conscience de soi libre. C'est, car elle peut être vécue parfaitement que dans l'état dans lequel nous sommes conscients seulement de notre être essentiel propre et non de toute pensée ou d'objets, le vrai bonheur ou la paix est au-delà de toute compréhension mentale.

Non seulement le bonheur existe en nous - c'est en fait notre vraie nature, notre être essentiel.
Le bonheur éphémère que nous semblons tirer des expériences extérieures, mais qui se pose réellement que de l'intérieur nous-mêmes, n'est en réalité rien d'autre que notre propre être essentiel. Le plus clairement que nous sommes conscients de notre propre être essentiel, le plus profondément et intensément que nous expérimentons le bonheur.
Le degré de bonheur que nous éprouvons à tout moment est directement proportionnelle au degré de clarté avec laquelle nous sommes alors conscient de notre être véritable et essentiel. Par conséquent le bonheur n'est pas seulement notre être essentiel, mais il est aussi notre conscience de notre être. En fait, puisque nous sommes la conscience que l'expérience de notre propre existence comme «je suis», nous sommes à la fois être et la conscience. En d'autres termes, notre être essentiel, c'est la conscience, ou plus précisément, il est la conscience de soi - conscience qui se sait clairement que «je suis». Par conséquent, étant donné que notre conscience dégagée de notre propre être est vécu par nous comme le bonheur, dans notre nature essentielle, nous sommes non-duelle être, la conscience et le bonheur.

L'activité en hausse et la suite de notre esprit distrait notre attention loin de notre être essentiel, ce qui assombrit notre clarté naturelle de la conscience de soi et d'obscurcir notre conscience du bonheur que nous sommes vraiment.
Par conséquent, tant que notre esprit est extraverti, assister à autre chose que notre être essentiel propre, nous ne pouvons jamais connaître parfaite, le bonheur permanent et absolu. Pour connaître le bonheur véritable et éternel, nous devons atteindre l'expérience de la vraie connaissance de soi, qui est, la conscience parfaitement claire de notre être essentiel propre.

Afin de vivre une véritable expérience tels la connaissance de soi, nous devons retirer notre attention de tout autre que nous-mêmes, et il se concentrer entièrement et exclusivement sur notre être essentiel propre, que nous avons toujours l'expérience sous la forme de notre conscience fondamentale - notre connaissance primaire: «Je «h.
Tant que nous assistons à notre moi le plus intime de cette manière, nous ne pouvons pas savoir qui ou quoi nous sommes vraiment, et à moins que nous ce qui l'expérience d'une connaissance claire et certaine de ce que nous sommes vraiment, nous ne pouvons pas être certains de la réalité ou la validité de tout connaissances que nous peut sembler avoir d'autres choses. Toutes nos connaissances sur le monde et Dieu - sur la science, la religion, la philosophie, la physique, la cosmologie, la psychologie, la théologie ou de toute autre branche de la connaissance humaine - est ouvert à de sérieux doutes tant que nos connaissances sur nous-mêmes - la conscience par laquelle tous ceux qui d'autres choses sont connues - est confus et incertain.

Par conséquent, si nous voulons connaître le bonheur permanent et absolu, ou pour parvenir à la connaissance dont nous pouvons être absolument certains, nous devons nous concentrer toute notre attention sur nous-mêmes vivement, notre conscience fondamentale de notre être essentiel propre, 
«je suis», dans le but de savoir qui ou quoi nous sommes vraiment.

Cette brève est la vérité simple mais profonde révélée par Bhagavan Sri Ramana.


samedi 19 mai 2012

Le tourbillon éternel du présent.

http://milajesuis.blogspot.fr/









Extrait du magnifique livre "Cela qui Rêve" de Alain GALATIS.



Pour appréhender ce qui Est, il est strictement indifférent que nous fassions ceci ou cela, que nous nous trouvions dans tel ou tel endroit, que nous ayons telle ou telle attitude. Il n’y a aucun travail à accomplir sur nous ; nul besoin d’essayer de devenir quoi que ce soit : plus sage, plus gentil, plus intelligent.


Toute la question réside dans le recul que nous pouvons prendre. Nous avons à nous détacher de nous-mêmes afin de nous observer. C’est cette distance – et elle seule - qui offre une vision large et profonde


Au quotidien, le changement induit par une telle prise de conscience se situe dans la manière dont nous allons percevoir et vivre les événements ; il ne s’agit pas forcément d’un bouleversement de notre entreprise, mais bien de leur appréhension. Ainsi continuons- nous de vivre avec les personnes qui nous sont proches, de travailler, de nous distraire, de nous cultiver, de voyager, de croiser des inconnus dans la rue, d’observer la nature ; cependant, chacun de ces instants peut être transfiguré par le regard que nous portons sur lui.


Très concrètement, le sentiment est radicalement différent si, dans un bus aux heurs de pointes, nous avons le sentiment d’être un individu à l’espace vital menacé, comprimé au milieu de soixante autres individus, ou si, observant les personnes qui nous entourent, vieillards, jeunes, hommes, femmes, enfants, nous percevons qu’il n’y a là que de l’Être ondulant, mouvant, dont nous faisons totalement partie. Plus personne ne peut nous être étranger, jamais. Cette sensation qui nous étreint dans un bus, nous pouvons l’éprouver à chaque instant dans toutes nos activités : au bureau, en mangeant, seul ou en face de notre compagne, lorsque nous nous promenons en ville ou dans la nature.


Il ne s’agit donc pas de changer l’individu pour qu’il devienne autre, mais bien, par le recul pris, de nous tenir en deçà, pour l’observer et l’animer.




L’identité d’une personne – c’est-à-dire son histoire et sa personnalité – relève de la représentation. Cette identité n’est pas manifeste dans le seul instant présent mais appelle le passé et le futur. Si nous cherchons à appréhender la seule réalité de cette personne, nous sommes tenus de laisser de côté cet aspect. Ceci semblera énorme, mais c’est d’une simplicité enfantine. Il ne s’agit pas de supprimer la représentation, de la nier ou de la juger : il s’agit simplement de la laisser de côté parce que nous cherchons ce qui n’est pas image.


Si nous ne tenons pas compte de nos pensées, que nous reste-t-il à appréhender ? Une présence physique. Un individu se trouve devant nous, mais nous ne sommes plus à même de décliner son identité. Pourtant parler d’un individu, c’est à nouveau avoir recours à une représentation. Nous le distinguons d’autrui et nous l’inscrivons dans une temporalité ; un individu connaît un début et une fin, un passé et un futur, qui sont, nous l’avons vu, de l’ordre de la représentation.


(...) Quelque chose est, dont nous ne pouvons strictement rien dire. L’effet de surprise passé, nous découvrons que tous les phénomènes possèdent cette même présence. A ce moment, nous commençons d’entrevoir l’unité des phénomènes. Autrui et nous-mêmes sommes une seule et même présence. Et tous les phénomènes relèvent de cette manifestation qu’il est légitime d’appeler le réel.


Il est donc possible et nécessaire de déconstruire notre conscience du monde dans un effort de distinguer la réalité et les représentations. Ainsi, dans une situation où deux amis se rencontrent, nous avons un premier niveau d’appréhension : Eric rencontre Jean. Mais nous pouvons distinguer un second niveau : un être humain rencontre un être humain. Simple constatation d’une apparence qui écarte la connaissance que nous en avons. Enfin, nous découvrons un autre niveau où ce qui Est appréhende ce qui Est. Le réel se rencontre. C’est l’extraordinaire découverte de pouvoir se reconnaître dans autrui. Autrui et nous-mêmes sommes du réel.


En devenant conscient de ces différents niveaux de lecture du réel, nous pouvons les embrasser d’un regard. Ainsi, face à un ami, nous voyons non seulement quelqu’un que nous aimons et que nous connaissons bien, mais également la présence émanant du réel dont nous faisons, nous-mêmes, partie. Quand nous sommes pris dans une discussion avec cet ami, il ne nous est pas nécessaire d’apprécier à chaque instant la profondeur de ce qui Est, mais nous en sommes constamment conscients.


Nous remarquons également de quelle manière un individu habite le présent. Nous découvrons comment, à partir du présent, nous construisons cette sphère de représentations dans laquelle nous évoluons psychologiquement. Ainsi, par exemple, quand quelqu’un nous parle, nous voyons la présence de l’être et comment cette présence déploie son imaginaire. Devant nous se trouve de l’être se pensant individu, exactement de la même manière que nous pouvons, nous-mêmes, le faire. A partir de là, nous pouvons également ressentir quelle conscience notre interlocuteur possède de cette situation. Ce qu’il nous dit et la manière dont il le communique révèle sa perception de la situation. Entre la personne obnubilée par son imaginaire, préoccupée uniquement de communiquer les images produites par son cerveau, vivant dans cette rêverie, et une personne constamment attentive à ce qui se produit à l’instant où elle vous parle, il y a là toute une gamme possible d’attitudes qui témoignent de ce que nous pensons être, de comment nous habitons notre individualité, de comment nous entrons en relation avec autrui.
Cette prise de conscience du réel s’apparente à un abîme s’ouvrant sous nos pieds : nous perdons tous les critères que nous utilisons pour apprécier une situation. Il s’agit d’un plongeon en chute libre dans ce qui Est. Mais, et c’est sa grande beauté, ce plongeon ne peut connaître de fin : il se révèle plongeon éternel.


Dès lors que nous plongeons mais que cette chute ne connaît ni temps, ni direction, elle s’apparente plutôt à un envol grâce auquel nous nous arrachons à la pesanteur de nos représentations.










NEANT


Le propre du réel est d’être ce qui existe. Si quelque chose existe – que nous nous garderons de définir – ce quelque chose, nous pouvons néanmoins le nommer le réel. Mais, dès lors, pouvons-nous concevoir ou appréhender une dimension de l’inexistence ; si quelque chose existe, y a-t-il quelque chose qui n’existe pas ? Autrement dit qu’est ce que le néant ?


Le concept de néant contient en lui-même une contradiction fondamentale : le néant est ce qui n’existe pas. Mais ce qui n’existe pas ne peut pas être quelque chose. Il ne peut y avoir une dimension où existerait ce qui n’existe pas. Le fait de l’existence exclut la possibilité d’une non-existence.


Penser le néant nous amène forcément à reconnaître l’inexistence de cette dimension, exactement de la même manière que lorsque nous pensons, à son extrémité, notre individualité, nous sommes obligés de reconnaître son inexistence.


Aussi étonnant que ce la puisse paraître, le concept de néant et celui de l’individualité sont totalement liés. Nous pouvons penser notre individualité grâce au néant ! Car l’unique possibilité de concevoir une individualité est de se référer à ce que ne sommes plus et à ce que nous serons. Penser l’individu dans l’unique instant présent est impossible. Nous avons besoin d’être conscients de ce qu’il a été (et qu’il n’est plus) et de ce qu’il sera (qu’il n’est pas encore). Cela signifie que nous inventons le néant pour pouvoir imaginer notre individualité !


Nous créons de toutes pièces une dimension qui n’existe pas, le néant, afin de pouvoir dégager une identité, l’individu, qui n’existe pas plus. Puis, amenés à croire que nous sommes cet individu, nous appréhendons de le voir disparaître dans le néant. Nous craignons de voir tomber ce qui n’existe pas dans ce qui n’existe pas. La chute ne sera pas très douloureuse ! Le réel s’amuse à se faire peur. En fait, l’appréhension de voir disparaître un phénomène révèle l’irréalité de ce dernier.


Si nous essayons d’appréhender le seul instant présent, qu’allons-nous faire de notre savoir ? La réponse est simple : rien ! C’est là un point excessivement important : il ne s’agit pas de combattre le connu, il n’est pas questions de le juger, de le nier ou de vouloir le supprimer ; nous ne nous préoccupons pas de découvrir pourquoi nous possédons tel ou tel savoir. Non, nous le laissons tranquille dans son coin ! Face à l’inconnu, toute préoccupation qui nous ramène au connu est une distraction qui nous éloigne de notre but.


Nous l’avons dit, dans un premier temps, nous ne pouvons pas, par un effort de notre volonté, nous détacher du connu. Ce n’est pas grave : ne nous occupons pas du connu et concentrons notre attention sur l’instant présent. Le moins que l’on puisse dire est que l’instant présent semble, pour notre esprit, excessivement fugace à saisir. Comme un éclaire qui zèbre le ciel par un soir orageux, à peine l’avons-nous aperçu qu’il a disparu. Or, il s’agit bien non seulement d’attraper un éclair, mais également de le chevaucher et de parvenir à tenir en équilibre sur son dos !


Cet instant présent nous confronte à une réelle énigme. Face à lui – et si nous refusons à recourir au passé et au futur - nous ne pouvons strictement rien dire : nous sommes en présence de quelque chose d’absolument inconnu.
Quand notre attention est tournée vers l’instant présent, quand nous tentons de saisir le mouvement de ce qui est, il n’est pas nécessaire qu’en plus nous nous préoccupions du sens donné à cet instant ; personne ne nous le demande ! Nous pouvons très bien nous contenter d’observer.


Dès lors, nous découvrons que nous pouvons nous distancier de notre savoir : il joue un rôle important et indispensable, mais il n’est pas nécessaire qu’il soit omniprésent dans toutes nos activités. Nous réalisons qu’il est possible de se passer du savoir. Nous avons accompli un premier pas – sans nous tenir au savoir, en lâchant prise – dans l’inconnu !
Tous les phénomènes que nous pouvons appréhender participent de l’unité. Ainsi, assis sur un banc public au centre ville et regardant les dizaines de personnes qui passent devant nous, déambulant ou se hâtant, se suivant ou se croisant, si nous nous contentons d’observer ce qui se produit dans l’instant présent, nous pouvons découvrir le mouvement de ce qui Est.


Nous observons une unique présence en perpétuel changement. C’est cette unité que nous découpons en distinguant différents individus. Il est particulièrement émouvant de nous rendre compte qu’il n’y a plus de distance entre nous. Nous sommes tous et toutes l’unité du réel.


Ce mouvement est absolument fascinant. Toujours assis sur notre banc public, nous pouvons observer un inconnu qui s’avance vers nous. Nous voyons une personne étrangère qui se déplace dans l’espace et le temps. Mais, augmentant le degré de notre attention, nous pouvons faire éclater cette apparence. Nous nous plaçons au cœur de l’instant et nous découvrons un mouvement, une ondulation, un kaléidoscope de l’être en perpétuelle mutation.
Les deux étrangers pris chacun dans son univers, dont les regards se sont à peine croisés, effleurés, ne le sont plus : il n’y a que de l’Être absolument insécable.


Il n’y a que de l’Être et, tous, nous sommes pris dans son mouvement. Tous nous dansons dans la parfaite harmonie de ce rythme. Et nous ne pourrons plus jamais écraser maladroitement les pieds de notre partenaire. Tous, nous sommes danseurs étoiles ! Etoile le grain de sable ! Etoile le brin d’herbe ! Etoile l’insecte ! Etoile l’animal ! Pris à jamais dans le tourbillon éternel du présent.


Mais comment danser éternellement puisque nous allons mourir ? Envisageons-nous une danse macabre ? Une sarabande de squelettes ? Un cliquetis joyeux d’ossements entrechoqués ? Les douces volutes d’une fumée ? Le bal pour nous va forcément se terminer, les lumières s’éteindront, le rideau tombera.


Non ! Cette danse ne dure pas : elle est ! Elle ne connaît ni début, ni fin ! Et si nous entrevoyons cette pulsation, si nous saisissons cette pulsation, nous découvrons que nous sommes cette pulsation. Ce qui disparaît alors est l’image d’un phénomène qui dure. Ce qui disparaît est la croyance en l’existence d’un phénomène qui dure.


Il n’y a que ce mouvement incessant du réel dans lequel scintillent des myriades d’étincelles, reflets d’une lumière première. Notre existence n’est pas celle d’une pauvre étincelle isolée qui à peine apparue, disparaît déjà dans l’obscurité des siècles infinis. L’étincelle a pris conscience de sa nature. Et par l’étincelle éphémère, nous parvenons à la plénitude infinie du réel.


Nous sommes liés, cher ami. En contact. A des dizaines ou des milliers de kilomètres. Sans lever le petit doigt. Sans bouger une oreille. Sans nous déplacer d’un millimètre. Nous sommes un seul et même être.