mardi 22 avril 2014

    







JEAN KLEIN
Dès que vous vous prenez pour quelqu’un, il y a contraction, il y a localisation, mais quand vous êtes complètement affranchi de l’idée d’être une personne, vous êtes en expansion, vous êtes en méditation permanente.
Si vous essayez de méditer, vous provoquez un état, car il y a intention, anticipation. Vous avez un but, vous visez un résultat. S’il y a intention, il ne peut pas y avoir de lâcher-prise. C’est très clair : aussi longtemps qu’il y a intention, il n’y a pas de lâcher-prise.

Acceptez comme un principe qu’il n’y a rien à atteindre, parce que ce que nous cherchons, nous le sommes déjà. Ce que nous cherchons, c’est notre proximité. Ce que nous cherchons, c’est le chercheur. Quand vous verrez cela, vous sentirez combien chaque pas que vous faites pour vous atteindre, vous éloigne de vous. C’est alors que se produira un lâcher-prise complètement naturel, car il n’y a rien à gagner, rien à perdre. Voyez comment cette compréhension agit sur vous. Vous vous découvrirez, naturellement, tel que vous étiez avant d’être né.

Vous êtes toujours le témoin, aussi n’avez-vous jamais à essayer de l’être. Si vous essayez d’être le témoin, vous objectivez ce que, dans tous les cas, vous êtes. Il n’y a personne pour penser, pour agir, pour souffrir, pour se réjouir. Cela n’existe pas. Il y a joie, il y a action, mais personne pour accomplir quoi que ce soit.

Vous pouvez seulement être votre présence, vous ne pouvez jamais connaître votre présence. Ce n’est que dans votre totale absence que vous pouvez être votre présence. N’en faites pas une formulation intellectuelle ; sentez ce que cela veut dire, vivez aves cela – votre absence.

Quand vous direz « Je ne sais pas », vous verrez que vous êtes ce que vous cherchez. Quand vous traquez le « Je suis » à travers des techniques ou des systèmes, vous l’objectivez. Vous devez réellement voir dans votre vie quotidienne que, quand vous le cherchez, vous vous en éloignez. Quand vous en prenez conscience, il se produit alors un complet lâcher-prise.

Vous pouvez seulement être la vérité, vous ne pouvez jamais connaître la vérité. Cette connaissance se perçoit en l’absence d’un vous-même, quand il n’y a pas d’image ; alors il y a certitude. La vérité apporte sa propre certitude ; elle n’a nul besoin de preuve, elle est sa propre preuve. Tout ce qui se manifeste autour de vous peut susciter le doute, mais ce qui est le plus proche de vous, je veux dire la conscience, ne relève jamais du doute. Tout ce que vous pensez pouvoir chercher relève du déjà connu.

Quand on voit que la personnalité est une illusion, alors tout effort pour la maintenir disparaît, et rien ne demeure qui soit personnel. Ce qui demeure est universel, fluide, sans attaches. Cela apparaît spontanément quand il y a nécessité et disparaît quand il n’y a plus nécessité. C’est un véhicule qui surgit dans votre conscience, il n’y a pas à s’identifier à lui.

Ce que fondamentalement vous êtes ne peut jamais être objectivé parce que vous l’êtes.

Un objet est un fragment ; il apparaît dans votre totalité, dans votre globalité. Quand vous comprenez réellement que le chercheur est le cherché, toute votre énergie se trouve naturellement déchargée d’avoir à trouver quelque chose.

Vous ne pouvez jamais percevoir votre totalité. S’il y a quelqu’un pour percevoir, il n’y a pas totalité. Or, votre totalité est faite de sa propre perception. Aussi est-il clair que votre totalité ne peut jamais être perçue, elle ne peut jamais être un objet. Elle est non-duelle. Il faut qu’il soit bien clair pour l’esprit que ce que vous cherchez est le chercheur lui-même. Quand vous voyez réellement cela avec votre intelligence, votre amour, votre compréhension, il se produit un lâcher-prise naturel à toute production d’énergie. Toute l’énergie vouée à la découverte de quelque chose est ramenée à sa patrie originelle. C’est ce moment d’équilibre que vous devez vivre.

Nous ne pouvons jamais découvrir ce que nous sommes, nous ne pouvons découvrir que ce que nous ne sommes pas, parce que nous sommes, en toutes circonstances, ce que nous sommes. Et pour savoir ce que nous ne sommes pas, nous devons découvrir en quoi consiste ce que nous ne sommes pas : notre corps-pensée.

Il vous suffit de savoir que le corps-pensée apparaît en vous, vit en vous, mais que vous n’êtes pas dans le corps-pensée. Si vous étiez fait de la même étoffe que le corps-pensée, vous ne pourriez jamais être conscient du corps-pensée. Le corps-pensée, sa substance, sont en vous, dans votre conscience, mais vous n’êtes pas dans cette substance. Vous êtes plus que le corps-pensée. C’est pourquoi vous êtes à même de le percevoir. Il suffit d’être conscient de ces moments, qui sont des moments intemporels, avant que le corps-pensée ne s’éveille le matin.

Vous vous percevrez présence avant l’éveil du corps-pensée. Chaque matin, vous créez le corps-pensée, chaque matin vous créez le monde.

Quand vous êtes dans le sommeil profond, où est le monde pour vous ?

Quand vous êtes dans le sommeil profond, le monde n’existe pas pour vous. Le monde apparaît quand le corps-pensée apparaît parce que le corps- pensée appartient au monde. Vous créez votrepropre monde qui apporte sécurité à votre ego, à votre « moi ».

Le corps-pensée n’a pas d’existence en soi. La conscience lui est nécessaire. Vous êtes présence avant que le corps-pensée ne s’éveille le matin. Le corps-pensée est plus ou moins une surimpression sur votre conscience. Que vous soyez ici, que vous cherchiez l’authentique équilibre, la paix, la joie, cela n’existe que parce que vous en avez eu un aperçu, et cet aperçu ne peut venir que du sommeil profond ou d’une perception directe qui appartient aussi à ce non- état de sommeil.

Aussi le corps-pensée n’a-t-il aucune réalité en soi, parce qu’il dépend de la conscience.

Nous mourons chaque soir et nous naissons chaque matin. Et pas seulement là. Nous naissons d’instant en instant.

L’écran demeure, il est là de l’aube au crépuscule, seule changent, sur l’écran, les images.

Accepter, c’est lorsque vous dites : « Je ne sais pas ».

Ce qui vous recherche, c’est vous. C’est la recherche de soi-même, par soi-même.

Ce que vous cherchez, vous l’êtes déjà : vous ne pouvez recevoir cela de moi que comme une information de seconde main. Quand vous en ferez votre point de départ, vous deviendrez conscient de touts les efforts dispensés dans la réalisation de vos buts, de vos désirs, de votre accomplissement. Accepter cette information de seconde main vous conduit à observer l’énergie qui accompagne tout processus de devenir. Quand vous verrez cela, vous ne serez plus le complice de ce processus, de ce gaspillage d’énergie. A un certain moment, vous abandonnerez toute projection, toute convoitise. Ce n’est pas un lâcher-prise volontaire, c’est un lâcher-prise qui se produit de lui-même. Et à ce moment-là, vous êtes libéré de toute action. Ce moment ne renvoie qu’à lui-même. En d’autres termes, poétiquement parlant, vous êtes saisi. Mais vous devez d’abord prendre à votre propre compte que ce que vous cherchez vous l’êtes déjà.

La conscience est. La conscience est vie. Tout ce qui existe, tout ce qui est perçu, sont des expressions, des prolongements de la vie, de la conscience. Mais la conscience est.

Notre vraie nature est ouverture, silence. Elle se manifeste dans la compréhension instantanée que la vérité ne peut jamais être acquise. Tout ce que nous cherchons et trouvons est un objet. Il apparaît clairement que le chercheur est le cherché, que le chercheur est cela même qu’il cherche ; alors toute tentative de trouver quelque chose cesse.

Quand vous voyez réellement que ce que vous cherchez est vous-même et que vous trouvez, au terme de nombreuse années d’investigation diverses, à travers tous les systèmes, toutes les techniques, que vous êtes ce que vous cherchez, il y a alors une révélation fantastique. Parce que, lorsque vous voyez cela, il vous apparaît que toutes ces directions, expériences et techniques ne sont que des objets. Eux, vous les trouvez, mais le sujet, jamais, car le sujet ne peut jamais être objectivé.

Voir cela entraîne un arrêt de cette investigation multidirectionnelle, et tout alors renvoie à ce moment d’arrêt, toute chose ne fait plus référence qu’à elle-même. Vous percevez clairement qu’il n’y a nulle part où aller. C’est une révolution dans votre vie. Tel est le sens du Tao : « le Tao que vous pouvez trouver et nommer n’est pas le Tao ».

Quand vous comprendrez qu’il n’y a rien à trouver, que tout ce que vous pouvez trouver est un objet et une limitation, quand vous saurez que vous êtes cela même que vous cherchez, alors vous saurez que vous êtes un joyau. Toute votre activité changera.

Tout ce que vous pouvez trouver n’a pas d’existence en soi, pas de réalité en soi, car cela n’a aucune autonomie. Il y faut la conscience, il y faut la présence, pour que vous puissiez le connaître. Quand vous voyez cela clairement, il se produit un lâcher-prise. Ne quittez pas ces moments là

Le total lâcher-prise, la détente complète, c’est comme si vous disiez : « Je suis au terme, j’ai regardé partout, je ne sais pas ».

Le monde se limite à notre environnement le plus proche; votre corps, vos sensations existent seulement lorsqu'ils sont pensés. Ils n'ont aucune réalité propre, en dehors de l'ultime sujet, le "je", et comme ils proviennent de lui et s'achèvent en lui, ils ne sont pas d'une nature différente de ce "je" conscience.

Tout ce que vous pensez, ressentez, accomplissez est passager ; la sensation d’être est leur support, elle est permanente. Laissez-vous inviter le plus souvent possible par le pressentiment, le souvenir de cette sensation, et plongez-y de plus en plus jusqu’à ce que la réalité vous emporte.

Le monde existe parce que vous existez, mais vous n’êtes pas le monde. Les objets de la conscience, noms et formes, représentent l’univers ; la réalité, qui est tout silence, est au-delà. Vous mettez l’accent sur le nom et la forme et ainsi la vérité vous échappe. Nous ne sommes rien en dehors de la conscience : l’univers, vous et moi y apparaissons.

La conscience est toujours là, dans la présence ou l’absence de la pensée, et rien n’est en dehors d’elle ; tout apparaît en elle, y compris la mémoire, sans qu’elle en soit affectée. Nous pouvons donc dire que la mémoire n’est qu’une idée qui nous a traversé l’esprit à l’instant même : le présent, le passé, le futur se situent « maintenant ».

Le sel n’a pas besoin d’être salé pour être sel, il est salé. Le sucre est sucré naturellement. Le Soi se connaît lui-même par lui-même directement, sans passer par aucun intermédiaire. Vous ne pouvez sentir l’encens qui brûle, voir la feuille d’une plante sans l’organe sensoriel correspondant, mais le contenant se sait pendant que le contenu sous tous ses aspects se manifeste. L’eau n’est pas affectée par les poissons qui s’y ébattent, elle reste toujours de l’eau.

Rien n’existe à l’extérieur de vous, tout est inscrit en vous. Ce que vous voyez, ce que vous faites est une création de l’instant même. La mémoire seule y ajoute une continuité, c’est elle qui précise que vous étiez ici hier ou avant-hier.

Soyez sans relâche le témoin de vos activités, la vigilance clarifie le mental et vous situera tôt ou tard sciemment au-delà de lui.

Soyez lucide et renoncez à ce que vous n’êtes pas.

L’univers dont vous êtes la source obéit à sa propre loi, selon sa propre ordonnance. Ne cherchez pas les causes de ce que vous croyez être ; c’est une dépense d’énergies complètement vaine. Ce que vous êtes foncièrement est au-delà de toute cause et de tout perfectionnement. Se croire l’auteur de ses actes a sa racine dans l’illusion d’un moi et de ses propriétés.

Vous devez fréquemment, et aussi souvent que l’occasion s’en présente, vous tourner vers ce qui est à l’arrière-plan. Votre attention se perd constamment dans les objets et les idées, et le sen d’être vous échappe entièrement. Devenez spectateur du courant de votre vie, de vos motifs, de vos actions et de leurs résultats.

Souvenez-vous, aussi souvent que l'occasion s'en présente, que dans une expérience objective vous êtes l'ultime connaisseur, en dehors de tout espace-temps.

Nous ne pouvons changer la Société ou notre environnement qu'en changeant nous-mêmes.

L'objet n'a pas de réalité, c'est nous seuls qui lui en créons une. C'est notre mental qui crée l'objet.Sans mental, il n'y a pas d'objets, il n'y a que Conscience.Donc, ce que nous appelons le monde, la maladie, la souffrance, etc.,est uniquement une projection mentale, pas autre chose.

Comment la Conscience pourrait-elle être témoin de changement d'états, tels que la jeunesse, la maturité et la vieillesse, ou le sommeil, la veille et le rêve, et comment pourrait-elle les constater si elle n'était hors du changement?

Le"Percipient" est donc d'une tout autre nature que ce qui est perçu.

Vous vous êtes incarnés pour vous connaître,rien d'autre.

Si vous vous souvenez de votre enfance ou de votre adolescence, c'est que "Celui" qui connaissait ces différents états est toujours présent et identique à lui-même.

Le monde et ses objets ne sont rien d'autre que sensorialité.C'est par l'intermédiaire du mental et de ses agents, les sens, que le monde nous apparaît.Et lorsqu'on admet, non seulement que le mental et les sens sont des objets perçus, mais encore qu'ils sont en continuel changement, il nous devient évident qu'ils ne contiennent pas notre véritable nature.

Nous sommes le Témoin de l'incessant mouvement des choses de ce monde, Témoin qui est soustrait au devenir, qui est étranger à l'Espace et au Temps, et qui ne connaît ni naissance ni mort.

Il ne s'agit là nullement d'une croyance ou d'une foi mais d'une expérience, d'un vécu qui dépasse toute spéculation intellectuelle et qui nous reconduit à la liberté inconditionnée et à la joie pure de l'être.
Merci au blog "etre et conscience"

mercredi 9 avril 2014

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Le Yoga intégral :

Le Yoga de la perfection personnelle commence avec la méthode du Védanta et aboutit à l’objectif du Tantra. En effet, dans le Védanta, l’âme et l’esprit sont de la plus grande importance, alors que dans le Tantra, c’est Shakti, la Nature, qui tient la première place. Dans le Védanta, Shakti est ignorée et dans le Tantra, l’âme, Purusha, est secondaire.

Le développement yoguique débute avec l’âme qui se tourne vers la Nature et culmine avec la spiritualisation des ses pouvoirs. La Shakti est élevée et utilisée par l’être centré sur son âme. Les centres de conscience sont gardés ouverts à l’action de Mahashakti. Ceux qui sont prêts ou sont les plus réceptifs s’ouvrent d’abord et le mouvement s’étend à partir d’eux. Le Yoga de la perfection personnelle commence avec la méthode du Védanta et aboutit à l’objectif du Tantra. En effet, dans le Védanta, l’âme et l’esprit sont de la plus grande importance, alors que dans le Tantra, c’est Shakti, la Nature, qui tient la première place. Dans le Védanta, Shakti est ignorée et dans le Tantra, l’âme, Purusha, est secondaire. Le développement yoguique débute avec l’âme qui se tourne vers la Nature et culmine avec la spiritualisation des ses pouvoirs. La Shakti est élevée et utilisée par l’être centré sur son âme. Les centres de conscience sont gardés ouverts à l’action de Mahashakti. Ceux qui sont prêts ou sont les plus réceptifs s’ouvrent d’abord et le mouvement s’étend à partir d’eux. Dans le Yoga, la réalisation individuelle est la base de la divinité à l’intérieur du cosmos et, par elle, se fait l’unité spontanée avec tous les êtres. Cette triple réalisation mène à la participation de l’aide divine à l’accomplissement de l’humanité.

Le Yoga ne rejette pas la Nature ou ne demande pas le retrait de la vie dans le monde. Il tend vers la maîtrise des pouvoirs de la Nature pour en transformer la destination. Il accepte la vie pour en transformer le caractère. Il reconnaît que la vie, telle qu’elle est vécue, est rudimentaire, imparfaite et artificielle. Il aide à trouver le centre véritable de vie et, à partir de lui, à changer de direction et de manière de vivre. En d’autres mots, il veut spiritualiser et diviniser la vie. L’action est une loi de la nature. Elle n’est pas toujours physique. Elle peut être d’ordre psychologique, intellectuel ou vital (c’est-à-dire en relation avec les énergies de la vie). Il y a un courant constant d’énergies dans toutes ses formes. Et ce courant, selon une autre loi de la nature, produit son propre karma. Chaque action entraîne une réaction et la somme des réactions ainsi produites crée un asservissement. Ainsi, toute action peut devenir un moyen d’asservissement.

En général, l’action est accomplie par une motivation, celle de l’ego, c’est le désir. La projection du désir peut être personnelle ou plus large, par exemple lorsqu’il est en rapport avec la société, la nation etc. C’est la motivation qui est la cause réelle du karma. Lorsque l’action est effectuée sans désir, lorsqu’elle est gouvernée par le sens du devoir sans qu’il y ait de choix personnel, alors la situation devient différente. L’aspirant apprend à abandonner ses motivations ordinaires et travaille avec un esprit de consécration au Divin. Il considère chaque action comme un sacrifice et l’accomplit dans l’esprit d’offrir ses énergies au Maître de l’action. Ainsi réalisée, l’action n’est pas altérée par les éléments de l’ego et du désir. Et le chercheur devient un instrument adapté au rayonnement de la conscience divine. Un autre point important est la purification des sentiments inférieurs, des émotions, des pulsions et des activités. On demande à l’aspirant de ne pas s’appesantir sur le côté négatif des choses, mais de s’attacher à leur côté positif qui l’emportera rapidement. L’être psychique est l’élément divin dans l’homme. Il est aussi la source de ses potentialités divines, par exemple les qualités et les pouvoirs de nature divine que représentent l’harmonie, la paix, la compassion, la bienveillance, l’amour, la dévotion et le désintéressement. C’est dans la mesure où l’aspirant puise à cette source et s’ouvre à son influence que sa nature est purifiée. En général, le Purusha psychique se tient en retrait du voile épais de la nature ignorante et multiple, il ne peut agir qu’indirectement à ses meilleurs moments, par exemple quand on se sent pur, pacifié, généreux, aimant, amical envers tout le monde etc. C’est le premier pas dans le Yoga intégral : s’éveiller à la présence de l’être psychique intérieur et ouvrir le passage à l’action directe en épurant la nature des éléments inférieurs et en laissant se manifester les éléments supérieurs menant au Divin.


Le fruit de la réalisation psychique est l’amour, l’amour total pour Dieu. L’apogée de cet amour est l’identité avec le Bien-Aimé qui conduit à une connaissance intime de Son Existence. Et l’union de cet amour avec cette connaissance nous poussent à des actes de service variés, comme signe d’adoration de Sa présence. La méditation est l’art de se mettre en harmonie avec un état d’être supérieur. Elle est l’art d’amener la conscience supérieure à agir en nous. L’aspirant suspend les

mouvements de son esprit tournés vers l’extérieur et les oriente dans la direction de son objectif spirituel. On distingue différents types de méditation. Premièrement, l’objet de la méditation peut être une idée, une forme, un son. L’esprit se concentre sur son choix, jusqu’à ce qu’il en soit imprégné et devienne un avec lui. Deuxièmement, l’esprit se concentre sur un objet unique. Il n’est pas autorisé à se déplacer. Le résultat de cette concentration est que l’objet offre à l’aspirant la connaissance de son contenu. Une autre façon de méditer consiste à se comporter comme un témoin et à simplement regarder les scènes et les pensées qui passent sur l’écran de l’esprit. Ne pas participer, observer seulement leur signification. C’est la méditation de l’observation sur soi. Enfin, traiter les pensées comme des éléments étrangers et refuser de les laisser pénétrer dans l’esprit est une autre méthode. Cela mène à une vacuité graduelle de l’esprit. C’est la méditation de la libération — elle aide l’esprit à sortir de son assujettissement aux vagues de pensées. Graduellement une sorte de division de la conscience se produit : la partie extérieure s’occupe de la routine matérielle tandis que la partie la plus importante se rassemble dans un nouvel équilibre. Parfois, il y a un glissement involontaire vers le sommeil pendant la méditation. C’est une réaction de la conscience physique à la pression de l’esprit qui s’intériorise. La seule réponse connue du corps est de se réfugier dans l’état de sommeil. Voilà pourquoi il arrive que l’on s’endorme. Il est bon de maintenir une continuité de la conscience. Conserver et assimiler tout ce que la conscience a développé et utilise de meilleure façon pour construire un futur significatif. Ainsi, toutes les réalisations spirituelles passées contribuent au progrès de l’esprit humain et à la transformation de la vie.

Swami Veetamohananda

vendredi 4 avril 2014

Aperçus sur le prânâyâma
Yoga, chacun le sait, veut dire « union ». On entend en général par là l’union de l’être humain avec l’Universel (laquelle, soit dit en passant, ne serait nullement possible si elle n’était déjà potentiellement réalisée). Mais, dans les yogas tantriques dont fait partie originellement le hatha-yoga, l’union qui est aussi visée est celle de la Conscience (Shiva) et de l’Energie (Shakti). Ce terme et cette notion d’énergie parlent beaucoup à nos contemporains. Partout, sur tous les plans, il n’est question que d’éveiller, développer, accroître, intensifier l’énergie. Il y a parfois quelque chose de naïf, de stupide, et parfois aussi de dangereux, de terrifiant (si l’on songe aux applications économiques ou militaires) dans cette quête effrénée de « toujours plus » d’énergie, de puissance, comme si la Shakti était d’ordre matériel et quantitatif. Les sages de l’Inde, même tantriques, n’ont cessé en effet de nous mettre en garde contre une recherche de l’énergie pour elle-même, sans l’éclairage, sans l’accompagnement lucide de la Conscience témoin. Mais c’est ainsi : l’être humain est avide de phénomènes et le chemin de l’Energie, flamboyant et fertile en sensations, exerce une séduction beaucoup plus vive que celui, aride et abrupt, de la Conscience pure.
La première erreur est que l’on confond souvent l’Energie et ses manifestations. Par exemple, le souffle, la sexualité, la pensée, la parole sont des manifestations de l’Energie mais ne sont pas l’Energie elle-même. S’attarder sur l’une ou sur l’autre de ces manifestations revient à confondre le flot avec la source, la forme avec le fond, le doigt qui montre la lune avec la lune elle-même. Tant que vous travaillez tel ou tel de ces aspects, vous obtenez sans doute des « expériences », vous gagnez même éventuellement des « pouvoirs », mais vous ne sortez jamais du cercle de l’ego, du désir, du vouloir individuel, vous restez dans le devenir, le samsâra… Tout autre chose est la plénitude d’énergie qui se dégage spontanément de la réalisation de l’Etre, sans l’intervention d’aucune méthode, sans manipulation de l’ego.
Précisons encore la notion d’énergie. Les taoïstes chinois ont fait dans ce domaine des distinctions aussi subtiles qu’utiles. Ils reconnaissent d’abord l’énergie naturelle que chaque individu possède et qui est fournie essentiellement par l’alimentation et la respiration. Puis vient l’énergie transformée par une pratique. Elle est de deux ordres : en premier l’énergie transformée extérieure, c’est-à-dire l’énergie naturelle modifiée, renforcée par l’effort volontaire et musculaire et par l’entraînement ; cette sorte d’énergie est considérée comme inférieure, profane, non fondamentale en tout cas dans une recherche d’Eveil. Mais il existe aussi une énergie transformée intérieure qui se développe, s’affine par une pratique initiatique (comme le Tai-ji en Chine ou le hatha-yoga en Inde). Pourtant même cette énergie subtile (jin) n’est pas encore la source, elle n’en est que la manifestation. La véritable source, c’est le « souffle intérieur » (qi), qui est en mouvement avant la naissance et peut être retrouvé par la pratique notamment respiratoire. Mais là encore prenons garde : il ne s’agit pas de la respiration physiologique constituée par l’alternance de l’inspir et de l’expir et qui s’est mise en mouvement dès la naissance. Le véritable souffle est interne : on dit encore « embryonnaire » ou « prénatal ». Chez la plupart d’entre nous, il n’est pas conscient. Il peut le devenir.
Dans la pratique indienne de même, tout prânâyâma commence par la conscience, la prise de conscience. Mais conscience ne signifie pas forcément contrôle. Car les gens obsédés de contrôle ne s’interrogent pas assez sur le contrôleur. Qui contrôle quoi ? Comment l’ego – qui est par nature limité, dysharmonieux – pourrait-il espérer amener un ordre, une harmonie dans le corps et le mental ? Ceux qui poursuivent avec acharnement ces méthodes ne voient pas qu’ils tournent en rond, qu’ils ne font au mieux qu’élargir leur prison. Que vous soyez capable de retenir votre souffle vingt secondes ou vingt minutes ne change pas grand-chose : de toute façon vous atteindrez toujours une limite, qui est celle soit de l’espèce, soit de votre incarnation actuelle.
Est-ce à dire qu’il ne faut rien faire ? Je suggère d’abord de se laisser respirer. Je sais : cette expression, souvent employée dans les cours de yoga, est devenue un cliché. Il n’empêche qu’elle recèle un sens profond. Ne pensez jamais, lorsque vous expirez, que vous « chassez » l’air : pensez plutôt (ou plutôt faites-le sans penser) que vous le donnez, que vous l’offrez. De même, n’associez jamais l’inspiration à un « prendre » : recevez, accueillez, acceptez ce qui vient. Ne laissez jamais intervenir la volonté dans les intervalles, abandonnez l’idée et jusqu’au mot de « rétention » (quelle avarice de vouloir retenir !). Le souffle s’interrompt, se suspend : très bien, observez, contemplez, savourez cette absence, sans projection, sans anticipation. Le souffle reviendra quand il voudra, il vous quittera quand il voudra. Ou encore inversez la perception ordinaire, imaginez que vous êtes le souffle et non pas celui qui reçoit et évacue le souffle. Prenez le point de vue du souffle. Vous allez, à l’inspir, envahir ce corps, ces poumons que vous aviez la mauvaise habitude d’appeler vôtres : quelle exploration fabuleuse ! Vous allez, à l’expir, pénétrer, envahir cet espace paraît-il extérieur, allez loin, aussi loin que votre esprit peut aller, que votre souffle-esprit devienne l’oie migratrice, traversez le ciel, diffusez-vous à l’infini.
Quand vous aurez expérimenté cela, il se peut que les « exercices » traditionnels de prânâyâma, les kapâlabhâti et les bhastrikâ auxquels vous vous shootiez, perdent beaucoup de leur attrait. Peut-être mais peut-être pas. Je ne veux rien préjuger. Il se peut au contraire que vous les redécouvriez avec une nouvelle fraîcheur et que les jeux retrouvés de l’Energie vous plongent, à vous en couper le souffle, dans la Joie véritable.
Pierre Feuga